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C'est pas mon idée !

dimanche 31 juillet 2016

Alliance de géants entre AXA et Alibaba

AXA
Encore une grosse surprise, en cette fin de mois de juillet, que le partenariat que viennent de signer AXA et Alibaba ! Il est vrai que les ambitions chinoises du premier et les velléités de mondialisation du second offrent un terrain favorable à une démarche plus ou moins inédite de convergence entre e-commerce et assurance.

Bien que présentée comme ayant une portée stratégique, la collaboration entre les deux géants ne sera, dans un premier temps, qu'exploratoire. Dans une logique de co-innovation, AXA et Alibaba affirment ainsi vouloir étudier ensemble les opportunités de développement de nouveaux produits et services susceptibles d'apporter plus de valeur aux clients des multiples plates-formes du e-marchand. Les premières pistes de recherche sont identifiées et elles couvrent déjà des domaines variés…

Dans le métier d'origine d'Alibaba, les échanges B2B, de nouvelles solutions d'assurance pourraient être proposées aux professionnels, tandis que le site AliExpress, dédié à la vente aux particuliers, intégrerait des options complémentaires telles que protection des moyens de paiement et autres extensions de garantie. La filiale financière du groupe chinois, Ant Financial, constituerait également un champ d'expérimentation avec, par exemple, une couverture destinée aux voyageurs à l'étranger.

Du côté d'AXA, qui affirme être aujourd'hui le premier assureur étranger dans l'empire du milieu, la conception de ces produits – qui devront nécessairement être adaptés à la culture locale – représentera une occasion de mieux comprendre ce marché immense, au potentiel considérable pour son activité, et d'y consolider son implantation. Dans cette optique, Alibaba est en mesure d'apporter non seulement sa connaissance du pays mais aussi, peut-être, ses technologies, notamment en matière de scoring

À l'inverse, la perspective d'Alibaba est beaucoup plus tournée vers l'international. Selon ses dires, le marchand compte principalement sur son partenaire pour affirmer sa présence outre-mer, auprès des consommateurs et des entreprises. Il s'agira en particulier de renforcer l'attractivité de ses plates-formes d'exportation de produits chinois – en croissance accélérée – grâce à une palette de services stimulant la confiance parmi ses clients et, plus globalement, améliorant l'expérience utilisateur.

Au-delà des ambitions d'expansion géographique des deux acteurs, leur partenariat esquisse une nouvelle vision de l'assurance, intégrant celle-ci au cœur des relations commerciales (internationales) et non plus comme un produit à part entière. L'idée en tant que telle n'est certes pas très originale mais il me semble qu'elle est ici pour la première fois abordée comme un axe stratégique, potentiellement voué à la généralisation.

Alibaba Group

samedi 30 juillet 2016

Fortis généralise les « banquiers volants »

BNP Paribas Fortis
Expérimenté depuis janvier dernier pour la souscription de crédit immobilier avec Hello Bank! Belgique, le concept de « banquier volant » – c'est-à-dire un conseiller qui se déplace à la rencontre de ses clients – va, selon le quotidien L'Écho, être généralisé à l'ensemble de l'enseigne BNP Paribas Fortis dès l'année prochaine.

À l'origine, le modèle était plutôt conçu dans une démarche de réassurance et de prise de connaissance, destinée à des nouveaux clients de la banque 100% mobile engagés dans une opération particulièrement importante. Dans cette deuxième phase de déploiement, l'objectif change sensiblement, puisqu'il s'agira de proposer une visite du conseiller à domicile (ou dans tout autre lieu) aux personnes qui ne souhaitent pas ou n'ont pas le loisir de se rendre en agence, celle-ci restant à leur disposition par ailleurs.

En pratique, chacune des 9 régions couvertes par le réseau de BNP Paribas Fortis possédera son équipe de « banquiers volants » – composée de 2 collaborateurs, initialement – qui ne seront plus rattachés à une agence spécifique. Équipés d'une tablette connectée, ils seront en mesure de réaliser toutes les opérations classiques, du conseil à la vente (y compris la signature de contrats, naturellement), où qu'ils se trouvent sur leur territoire, dans le salon de leur client, sur son lieu de travail…

La banque justifie son initiative avec des considérations habituelles sur l'évolution des comportements des consommateurs, qui fréquentent de moins en moins les agences (celles-ci ne représentent plus que 5% des interactions) mais exprime(raie)nt leur attachement indéfectible à une relation humaine pour des transactions substantielles (*). La réponse consiste donc à mieux satisfaire cette attente, en mettant à profit les technologies désormais disponibles et ainsi se rapprocher des clients.

En réalité, BNP Paribas Fortis est peut-être en train de dessiner une mutation beaucoup plus profonde de la banque, en décorrélant le principe du point de vente et les interactions en face à face. Après tout, avec la chute ininterrompue des taux de fréquentation (qui conduisent à des fermetures de plus en plus nombreuses), il doit inévitablement arriver un point où l'équation économique de l'agence devient fondamentalement intenable, rendant alors l'approche du « banquier volant » plus efficace et plus rentable.

Jusqu'à ce que les consommateurs basculent entièrement sur les canaux à distance…

La Banque en Toute Simplicité

(*) À moins que la réticence des clients ne soit simplement due à la lourdeur de la souscription en ligne, comme l'illustre, par exemple, le cas du crédit immobilier de Hello Bank! et ses contrats imprimés (à signer manuellement) transitant par la poste. Mais, bien sûr, personne dans la banque n'a encore envisagé cette hypothèse…

vendredi 29 juillet 2016

BPCE acquiert Fidor. Et maintenant ?

Fidor Bank
Coup de tonnerre dans le secteur bancaire européen : le groupe BPCE acquiert l'une des premières « néo-banques » de l'histoire (sinon la première), Fidor Bank ! Une fois la surprise passée, viennent les questions : quelles sont les motivations de cette opération, la greffe a-t-elle des chances de prendre, comment va-t-elle se dérouler…?

Certes, la banque française n'est pas tout à fait étrangère aux rachats de startups, ayant déjà absorbé successivement (en moins d'un an) Le Pot Commun et Depopass, via sa filiale S-Money. Cette fois, les enjeux ne sont toutefois pas les mêmes, entre autre parce que la cible se place en concurrence sur son cœur de métier, qu'elle est allemande (et porte donc une culture spécifique) et qu'elle possède une dimension relativement conséquente, avec sa communauté de 350 000 personnes, dont 120 000 clients.

Naturellement, les deux partenaires affichent leur optimisme pour l'avenir. Pour Fidor, l'entrée d'un actionnaire important à son capital lui offre les moyens de poursuivre, et accélérer, sa stratégie offensive, toujours aussi résolument tournée vers l'innovation, l'obsession du client… et l'internationalisation. Côté BPCE, le message est aussi simple, bien qu'il puisse être sujet à multiples interprétations : il s'agit de renforcer sa transformation « digitale », devenue son mot d'ordre depuis quelques mois.

S'il faut en croire les affirmations selon lesquelles la jeune pousse conservera une large autonomie de fonctionnement, l'hypothèse la plus vraisemblable, dans l'immédiat, est une diversification de l'offre existante du groupe bancaire, à travers l'ajout à sa panoplie d'un établissement 100% mobile qui lui faisait défaut jusqu'à maintenant. Les visées paneuropéennes de Fidor, pour l'instant installée en Allemagne et au Royaume-Uni, constituent également un facteur d'attraction pour une entreprise très franco-française.

La logique consisterait à opposer une résistance à la menace de nouveaux entrants (startups ou autres, tels qu'Orange Bank) grâce à une néo-banque qui reste l'une des plus originales et des plus séduisantes du monde, donc susceptible de conquérir la clientèle demandeuse de relation « digitale ». Cela, sans remettre en cause le modèle à réseau des deux principales enseignes du groupe (Banque Populaire et Caisse d'Épargne), considéré comme répondant aux besoins d'une majorité de consommateurs.

L'autre option, complémentaire, pour BPCE serait de capitaliser sur les actifs de la néo-banque en vue de moderniser ses propres activités. L'idée d'introduire les technologies de la petite (qui font aussi partie de son catalogue) dans les systèmes de la grande a de quoi faire rêver à une vraie transformation, en profondeur, apportant une agilité incomparable à une « vieille » institution. Il faut cependant craindre que l'ampleur d'un tel chantier dépasse sa capacité d'audace acceptable… Sans même parler du risque d'absorber dans ces efforts toute l'énergie des équipes de Fidor.

A minima, l'acquisition est un message fort lancé à tous les collaborateurs du groupe, les incitant à prendre conscience des mutations en cours dans leurs métiers et qui participe, de la sorte, à l'indispensable évolution de la culture interne. D'un point de vue opérationnel, le groupe BPCE doit maintenant prouver qu'il peut réussir une intégration extrêmement ambitieuse, pour laquelle il n'a ni l'expérience ni la préparation de BBVA lors du rachat de Simple, un des rares cas de succès dans ce type de transaction.

FAQ Fidor Bank à propos de l'acquisition par BPCE

Au fil du temps, j'ai souvent traité de Fidor Bank. Voici une chronologie de ses principales innovations au cours des 5 dernières années de « C'est pas mon idée ! » :

jeudi 28 juillet 2016

LenderBot marie assurance et blockchain

Stratumn
En partenariat avec Deloitte (pour son expertise métier ?) et LemonWay (pour la prise en charge des paiements), la startup française Stratumn présentait récemment son prototype LenderBot, une plate-forme de prêt d'objets entre particuliers fonctionnant de manière autonome, jusque dans la souscription de l'assurance, grâce à une blockchain.

Comme son nom le laisse entendre, l'application a été conçue sous la forme d'un chatbot, déployé sur Facebook Messenger. Derrière l'incontournable effet de mode, il est vrai que l'usage visé est parfaitement adapté à une intégration dans la messagerie instantanée, puisqu'il s'agit de permettre à deux personnes de convenir du prêt d'un objet (d'une certaine valeur, de préférence). Par l’intermédiaire de LenderBot, elles vont pouvoir valider les conditions de l'opération dans le prolongement direct de leurs discussions.

Ainsi, au moment de conclure, l'accord entre dans une phase de notarisation formelle : les deux parties signent (par voie électronique) leur engagement, tandis qu'une assurance temporaire (bris, perte, vol ?) est proposée à l'emprunteur, qui en règle la prime à travers le service de LemonWay. Chacun de ces actes est inscrit successivement dans un contrat unique et l'ensemble est enregistré dans la blockchain (il n'est pas précisé quelle instance) pour une conservation toujours accessible, sécurisée et infalsifiable.

LenderBot

Le processus (automatisé) opère entièrement en mode synchrone. De la sorte, l'accord entre en vigueur uniquement s'il a été effectivement confirmé par le prêteur et l'emprunteur et si l'assurance a été souscrite et dûment réglée. La mise en œuvre d'une blockchain publique permet de rendre visible de tous l'existence d'un contrat entre les signataires (utile, par exemple, pour instaurer un système de confiance « sociale »), mais seuls ces derniers disposent d'un accès à son contenu, tel qu'il a été certifié.

Le principe de LenderBot rappelle les (lointaines) expérimentations autour de l'automatisation du crowdfunding et il en retire les mêmes bénéfices potentiels, d'accélération, de fiabilisation et de rationalisation du traitement des transactions entre particuliers, sans requérir l'intervention d'un tiers de confiance. En revanche, les compagnies d'assurance risquent de rester sur leur faim, car ce rôle d'intermédiaire fiable est celui qu'elles assument aujourd'hui (au moins dans leur métier) et l'utilisation d'une nouvelle technologie ne leur apportera probablement aucun avantage décisif…

mercredi 27 juillet 2016

L'affacturage sans friction avec Finexkap

Finexkap
Depuis 1 an et demi, Finexkap démocratise l'affacturage en France, en le rendant accessible en quelques minutes à des entreprises qui n'intéressent pas les acteurs historiques du domaine. La jeune pousse veut maintenant en faire un acte de gestion intégré dans la vie quotidienne de ses clients, jusqu'à devenir presque invisible.

Au lancement de la plate-forme, la procédure opérationnelle de cession de facture de Finexkap restait relativement classique : outre l'envoi d'une copie du document, l'utilisateur devait remplir un formulaire dans son espace personnel afin de fournir les informations nécessaires à la prise en charge de sa demande. Cependant, très rapidement, quelques partenariats – notamment avec Sellsy (solution de gestion des ventes) et Sage (outils de comptabilité) – ont permis de simplifier les démarches, en instaurant une option de transmission automatique, sans ressaisie d'information.

Naturellement, ces logiciels ne sont pas universels et il est impossible pour Finexkap de développer des connecteurs pour tous les produits du marché. C'est la raison pour laquelle ses équipes ont déployé une API (interface de programmation applicative), qui procure à tout développeur la capacité d'intégrer simplement et en toute sécurité les fonctions d'affacturage (authentification, soumission de factures, consultation des offres, enregistrement de débiteur…) dans une application tierce quelconque.

Ainsi armés, les autres éditeurs de plates-formes de gestion seront, eux aussi, à même de proposer à leurs utilisateurs de céder leurs factures en un clic, sans devoir engager des négociations longues et des développements lourds. À moins que les adeptes de Finexkap férus de programmation (par exemple dans les nombreuses entreprises technologiques) ne s'emparent des API et ne procèdent eux-mêmes à l'intégration (voire créent leurs propres solutions) afin de simplifier leurs processus administratifs.

L'enjeu de cette approche peut paraître limité, il est en fait essentiel. Une grande partie de la valeur des entreprises de services (dont celles du secteur financier, naturellement) réside désormais dans la qualité de l'expérience client. Dans ces conditions, donner la possibilité à un trésorier de vendre une facture en un clic est une avancée extrêmement importante, car la réduction des frictions dans son quotidien aboutit non seulement à une meilleure satisfaction mais également à une utilisation plus fréquente.

En conclusion, il en est des entreprises comme du grand public : les produits bancaires ne sont jamais un but en soi, ils constituent uniquement un moyen. À ce titre, ils n'ont pas de raison fondamentale d'être commercialisés indépendamment de la finalité qu'ils servent. Dans ce sens, Finexkap, remet l'affacturage à sa place, c'est-à-dire au cœur de la gestion de trésorerie, où il devrait peut-être même un jour disparaître totalement (quand un robot saura déclencher seul les cessions, au moment nécessaire).

Accueil Finexkap

mardi 26 juillet 2016

DeepMind aide Google à économiser l'énergie

Billet de blog Google DeepMind
Entre la futilité d'une victoire au jeu de go et la crainte qu'elle n'asservisse l'homme, l'intelligence artificielle doit encore démontrer comment elle aidera à « rendre le monde meilleur ». Pour DeepMind, qui a fait de cette phrase sa devise, l'ambition pourrait commencer par une meilleure maîtrise de la facture énergétique de Google.

Le monde « digital » dans laquelle nous vivons désormais à conduit en quelques années à une croissance dramatique et ininterrompue des centres de production informatiques hébergeant les services que nous utilisons quotidiennement. Selon certaines estimations, ils représenteraient maintenant jusqu'à 5% de la consommation d'électricité dans le monde et, donc, une contribution significative aux émissions de gaz à effet de serre et leurs conséquences sur l'environnement (dont le réchauffement de la planète).

Naturellement, avec ses centaines de milliers (voire millions ?) de serveurs, Google figure en première ligne des responsables de cette inflation sans fin prévisible. Mais, autant par souci de responsabilité sociale que pour réduire ses coûts, elle est également, depuis une dizaine d'années, une pionnière des efforts en matière de réduction de son empreinte environnementale. Elle peut ainsi se vanter de concevoir des infrastructures à l'efficacité inégalée et d'investir constamment dans des sources d'énergie renouvelables.

Parmi d'autres approches d'optimisation, Google explore actuellement, avec sa filiale spécialisée DeepMind, les possibilités d'appliquer des techniques d'intelligence artificielle afin d'améliorer encore la performance de ses équipements. Après deux ans de recherche, une première mise en œuvre concrète a été testée dans un centre de production opérationnel et ses résultats sont extraordinaires : les algorithmes d'apprentissage automatique permettent de réduire de 40% les besoins de climatisation, durablement (soit une baisse de 15% de la consommation électrique totale du site).

Le refroidissement est en effet à la fois un des postes les plus gourmands en électricité des installations (parce que les puces électroniques dégagent beaucoup de chaleur) et un des défis les plus complexes pour les ingénieurs chargés d'en modéliser le fonctionnement (le nombre de paramètres entrant en jeu est colossal). Dans ce contexte, les méthodes prédictives de DeepMind apportent une solution idéale pour anticiper les évolutions de température et ajuster finement les réglages de climatisation.

La prouesse accomplie par DeepMind est d'autant plus notable que les centres de production de Google sont déjà hyper optimisés. Alors, on se prend à rêver aux économies (pas uniquement financières) que pourraient réaliser d'autres entreprises si elles se mettaient à appliquer les mêmes recettes… Hélas, même si ces dernières étaient rendues publiques, il est à craindre que les pré-requis ne seraient pas remplis (par exemple les milliers de capteurs dont les mesures alimentent les algorithmes).

En attendant la généralisation de l'intelligence artificielle dans les sites informatiques, il restera toujours possible d'adopter le « cloud » de Google, de manière à bénéficier indirectement de son expertise et réduire l'impact environnemental de l'entreprise…

Google DeepMind

lundi 25 juillet 2016

Tide, une néo-banque pour les PME

Tide
Dans le monde entier, les petites entreprises constituent généralement la clientèle la plus mal servie et la plus négligée par les banques. Hélas, les tentatives de créer de nouveaux modèles pour elles sont plutôt rares (on peut citer Seed, aux États-Unis, et Holvi, en Finlande). Les PME britanniques pourront bientôt opter pour une nouvelle venue : Tide.

Si, avec sa licence de monnaie électronique (déléguée par PrePay Solutions, les fonds collectés étant déposés auprès de Barclays), il ne s'agit pas (techniquement) d'une véritable banque, Tide n'en vise pas à moins à offrir, autour d'un simple compte courant, les services nécessaires pour opérer une activité professionnelle mieux que ne le permettent les établissements traditionnels. D'emblée, la startup se démarque de la concurrence en proposant la première solution exclusivement mobile sur son marché.

Tout le reste est à l'avenant : la petite nouvelle cherche avant tout à simplifier la vie (financière) de ses clients, en leur apportant les outils qui vont faciliter et accélérer leur quotidien. Cela commence dès l'ouverture d'un compte, dont il est promis qu'elle ne prendra que 3 minutes, après vérification de l'identité du demandeur, via la capture vidéo de son passeport ou de son permis de conduire. Une fois cette formalité remplie, le client dispose d'un RIB standard et obtient une carte de débit.

Plus original que les moyens de paiement et solutions d'encaissement, la plate-forme de Tide comprend également un ensemble de capacités, qui, sans être révolutionnaires, soulignent son extraordinaire attention aux préoccupations des entrepreneurs. Par exemple, la catégorisation automatique des transactions enregistrées est ici exploitée – en association avec la possibilité de capturer et associer les reçus et factures correspondants – dans le but de fluidifier les traitements comptables.

Accueil Tide

Les lourdeurs administratives peuvent même être encore réduites grâce à l'intégration directe avec certains services de gestion en ligne (tels que Xero ou FreeAgent). Les opportunités d'extension sont d'ailleurs quasiment infinies, puisque la jeune pousse met des API (« interfaces de programmation applicative ») à la disposition de ses clients, leur permettant de la sorte de connecter automatiquement leurs comptes bancaires avec leurs propres outils (voire de créer des applications spécifiques).

Il faudrait aussi évoquer les fonctions de délégation d'accès (contrôlé) aux collaborateurs ou, plus globalement, les mesures de sécurité mises en œuvre. Enfin, l'argument le plus convaincant de Tide sera son prix, puisque tout est gratuit, à la seule exception des virements, facturés 20 pence (et encore faut-il noter qu'ils sont exécutés en temps réel, sur le réseau Faster Payments). En fait, son modèle économique repose sur l'ajout de services tiers (les transferts internationaux devraient ainsi arriver prochainement).

Alors que les besoins sont immenses, elles ne sont pas nombreuses, les néo-banques qui osent s'attaquer au marché des PME. Il faut donc saluer la naissance de Tide et son ambition d'éradiquer les frustrations et pertes de temps liées à la gestion des finances des entreprises. Et espérons que son exemple en inspirera d'autres…

dimanche 24 juillet 2016

Le succès du Web Café ING

ING
Quand ING Direct (France) a ouvert son « Web Café » en 2013, je concluais mon billet sur une interrogation quant à la pérennité de la démarche ainsi engagée. Deux ans et demi plus tard, la banque fait le point sur son initiative, toujours active, et s'enthousiasme de la valeur inestimable qu'elle représente au quotidien pour ses clients.

Pour mémoire, le « Web Café » est une plate-forme ouverte (en ligne) dans laquelle ING invite ses clients à dialoguer librement, autour de 3 espaces : un blog dont les centaines d'articles abordent diverses questions relatives à la gestion des finances personnelles, un « labo » destiné à recueillir des idées de produits et services pour la banque de demain (dont près d'un millier ont déjà été reçues) et un forum de discussion où l'entraide permet de résoudre les petits et grands tracas rencontrés par les internautes.

Ce dernier, avec ses 16 600 inscrits et plus de 50 000 messages postés, illustre le mieux le succès du dispositif, dans sa dimension réellement communautaire. En effet, il n'est pas question ici de compter exclusivement sur les experts internes de la banque pour traiter les questions posées : dans la plupart des cas, les réponses sont apportées par d'autres clients, dont les plus fidèles – certains affichent plus de 1 000 contributions à leur actif – deviennent de véritables ambassadeurs pour ING Direct.

Cet engagement de quelques individus – qui n'y trouvent d'autre intérêt que la satisfaction d'aider leurs pairs et une reconnaissance symbolique de la part de la banque (sous forme d'un remerciement de temps à autre et un titre de « contributeur respecté ») – n'est pas entièrement dû au hasard. Avant le lancement du projet, ses responsables au sein d'ING France avaient identifié quelques personnes particulièrement actives sur Facebook et Twitter et en ont convaincus une vingtaine de participer à l'expérience.

Web Café ING Direct

Il aura fallu un peu de temps pour que les échos de cette réussite remontent dans la structure du groupe mais, depuis la fin de l'année dernière, les clones du « Web Café » ont commencé à éclore dans d'autres filiales d'ING, en Italie, en Pologne et aux Pays-Bas. Chacune de ces déclinaisons reprend le concept de base à l'identique (dont les 3 espaces distincts), tout en en ajustant les détails opérationnels (notamment les catégories thématiques, les modes d'évaluation des contributions…).

Est-il nécessaire de rappeler les bénéfices d'une approche communautaire pour l'assistance à la clientèle ? Outre la disponibilité (presque) permanente de bénévoles, toujours prêts à répondre aux interrogations des internautes, les échanges directs entre consommateurs revêtent également une qualité de relation différente, en termes de confiance, de modération de l'expression… L'exemple (plutôt rare) d'ING démontre brillamment qu'une banque est parfaitement capable de s'approprier ce modèle.

samedi 23 juillet 2016

Pokémon GO inspire Sberbank

Sberbank
Quelques jours après que la frénésie Pokemon GO se soit subitement emparée d'une partie de la planète, quelques entreprises ont commencé à vouloir profiter de la tendance. Parmi les banques qui s'y essayent, la russe Sberbank adopte une des démarches les plus originales, alors que le jeu n'est même pas encore déployé sur son territoire…

Très rapidement, plusieurs commerces, cafés, restaurants… ont identifié un moyen simple d'attirer des clients dans leurs établissements : pour peu qu'un « PokéStop » soit (par chance) localisé dans leur voisinage, l'usage de leurres, acquis à l'intérieur même de l'application, leur permet d'attirer des Pokémons et donc, par rebond, des joueurs en quête de créatures à ajouter à leur collection. Apparemment, la stratégie est efficace et fait progresser sensiblement la fréquentation de certains lieux.

Parmi les adeptes de cette technique, figurent une poignée d'institutions financières, espérant de la sorte capter un flux de visiteurs dans leurs agences. Sberbank est l'une d'elles. Elle promet ainsi de déployer des leurres sur les « PokéStops » qui se trouvent à proximité de ses locaux, pendant leurs heures d'ouverture. Au premier abord, l'idée est séduisante, mais elles souffre pourtant d'une sérieuse limitation : si une boutique ou un café est susceptible de déclencher un achat d'impulsion, ce ne sera pas le cas pour un guichet de banque. Les retombées commerciales directes resteront modestes.

Sberbank GO

Naturellement, il ne faut pas négliger la valeur marketing de l'opération et sa mise en valeur de l'enseigne auprès du grand public, qui plus est de manière récurrente. Toutefois, dans ce registre, Sberbank a une deuxième offre à proposer. La multiplication des incidents et accidents plus ou moins graves dus à la distraction des joueurs a en effet inspiré à l'entreprise la création d'un contrat d'assurance dédié, gratuit, destiné à couvrir les blessures survenant pendant l'utilisation de l'application Pokémon GO.

Sberbank souligne la valeur pédagogique de son approche, qui sensibilise une audience majoritairement jeune aux bénéfices d'une garantie. Par ailleurs, a minima, (je dois avouer ne pas avoir lu les dizaines de pages de conditions, rédigées exclusivement en russe), la souscription en ligne, extrêmement simple, donnera aussi l'occasion à la banque de constituer une belle liste de contacts. Celle-ci sera certainement utile au moment d'envisager d'autres opportunités, si le phénomène Pokémon GO perdure.

Un succès de la taille de celui de ce jeu (il aurait conquis 30 millions de personnes dans le monde en 2 semaines) suscite inévitablement des désirs d'en tirer parti. Les initiatives dans ce but n'en sont probablement qu'à leurs débuts, mais Sberbank fait déjà preuve dans cet exercice d'une créativité et d'une réactivité peu communes pour le secteur !

Information repérée grâce à – entre autres – Benoit Denéchère (merci !)

vendredi 22 juillet 2016

Wells Fargo et Amazon courtisent les étudiants

Wells Fargo
Quand les institutions financières rencontrent les « GAFA », il est généralement question de Google, Apple et Facebook. Mais pour Wells Fargo, une opportunité d'un nouveau genre s'ouvre avec Amazon, à travers une offre promotionnelle conjointe destinée aux étudiants. Et peut-être faut-il y voir plus qu'une simple opération commerciale…

Le principe de la campagne mise en place par les deux partenaires est simple dans ses termes : les abonnés au service de livraison rapide « Prime Student » inscrits dans une université américaine peuvent bénéficier (sous réserve d'éligibilité) d'une réduction de 0,5% sur le taux d'un emprunt étudiant souscrit auprès de la banque. Afin d'en profiter, il suffit au demandeur de soumettre son dossier sur un espace dédié en ligne, en se connectant d'abord avec ses identifiants Amazon.

Derrière cette collaboration, la motivation de Wells Fargo en rappellera d'autres, puisqu'il s'agit d'aller à la rencontre des futurs clients là où ils sont présents. En l'occurrence, plutôt que d'attendre que les jeunes franchissent la porte d'une agence, il est préférable de s'installer sur un site de commerce en ligne qu'ils fréquentent massivement – entre autres pour leurs achats de fournitures scolaires (entre livres et matériel informatique) – et qui leur propose déjà un certain nombre de privilèges spécifiques.

Promotion Wells Fargo - Amazon Prime Student

L'initiative pourrait également recouvrir une autre dimension, plus opérationnelle (je précise toutefois que rien n'indique que ce soit le cas). En effet, la connexion de la demande de crédit avec le profil de client et abonné Amazon ouvre une possibilité inédite (dans une banque) d'affiner la connaissance de l'emprunteur et, par une analyse de ses comportements d'achat, mieux déterminer son profil de risque. Le gain de qualité dans le « scoring » justifierait alors certainement l'avantage consenti par Wells Fargo…

D'un point de vue technique, l'hypothèse n'a rien de farfelu, comme le démontre l'exemple du service Sesame Credit d'Alibaba (pour n'en citer qu'un). Et si elle n'est pas concrétisée aujourd'hui, peut-être le sera-t-elle à terme. En tout état de cause, il vaudrait mieux pour Wells Fargo, et pour les banques en général, collaborer avec Amazon pour améliorer leurs services financiers, que d'attendre que ce dernier ne se lance lui-même sur le marché (comme son homologue chinois), avec une solution hyper-optimisée…

jeudi 21 juillet 2016

Un chatbot pour gérer ses finances personnelles

Trim
Décidément, la vogue des chatbots bat son plein ! Après l'accès aux comptes proposé par quelques banques, c'est maintenant au tour des solutions de gestion de finances personnelles d'entamer leur migration. Ainsi, Trim est l'une des premières à s'installer sur Facebook Messenger pour remplir sa mission de détection des dépenses inutiles.

La vision des fondateurs de la startup est on ne peut plus claire : victimes de leur succès, les applications mobiles sont en voie d'obsolescence, les consommateurs préférant désormais disposer d'un assistant virtuel, toujours prêt à répondre à leurs questions au sein de leur outil de messagerie préféré. Pour Trim, le choix est d'autant plus évident que la fonction remplie par son service est extrêmement facile à adapter à une interface « conversationnelle » (elle est disponible également par SMS).

En effet, son mode opératoire est simple et bien balisé. Après inscription et connexion à son compte bancaire, l'utilisateur peut, par l'intermédiaire de messages simples, interroger le solde et les dernières opérations enregistrées et, surtout, obtenir une analyse plus précise sur certains postes de dépenses, tels que le montant total des courses Uber sur une période donnée ou la liste de ses abonnements en cours. Pour ces derniers, Trim peut même se charger de leur résiliation (il suffit de répondre « oui » à sa suggestion).

Chatbot de Trim

Le dispositif est encore rudimentaire – par exemple dans son modèle de dialogue par mots-clés prédéfinis – mais il laisse augurer d'une évolution du concept de PFM (gestion de finances personnelles). Celui-ci se transformerait en un conseiller financier personnalisé, maîtrisant la situation de l'utilisateur, répondant instantanément à toutes ses questions, exécutant ses requêtes instantanément et prodiguant continuellement ses recommandations en fonction des événements et du contexte, le tout dans un environnement familier, en offrant une expérience proche d'une interaction humaine.

Au-delà de l'effet de mode actuel autour des chatbots, une telle vision a-t-elle véritablement un avenir, dans la durée ? D'un côté, la lassitude des mobinautes face à l'explosion du nombre d'applications disponibles sur les AppStores – qui se concrétise par un usage de plus en plus restreint à quelques titres « stars » – permet de l'envisager. Toutefois, la multiplication des « interlocuteurs » sur les plates-formes de messagerie ne risque-t-elle pas d'engendrer (plus ou moins) rapidement le même phénomène ?

Alors, peut-être faut-il dès maintenant viser plus loin, vers un assistant universel (Siri, Alexa…), fédérant l'ensemble des services mis à disposition du consommateur, voire les intégrant les uns avec les autres pour les rendre plus pertinents. Par ailleurs, dans une perspective légèrement différente, le besoin de réduire les frictions de l'expérience pointe aussi vers des approches plus proactives, dans lesquelles les outils répondent spontanément aux besoins de l'utilisateur sans que ce dernier n'ait à les solliciter.

mercredi 20 juillet 2016

La désintermédiation illustrée…

Chase
Depuis plusieurs années, quelques analystes prédisent un mouvement de « désintermédiation » des banques, que ces dernières ignorent superbement ou dont, a minima, elles relativisent les impacts potentiels. Aujourd'hui, la tendance commence à se concrétiser, notamment à travers de nouveaux usages, et ses effets deviennent visibles.

Un exemple intéressant a ainsi été fourni récemment par Bradley Leimer (responsable de la stratégie Fintech à Santander US), lorsqu'il a reçu une offre promotionnelle de la part de Chase dans le cadre de son partenariat avec Uber. Outre la démonstration de méconnaissance de son client par la banque (puisqu'il est déjà utilisateur d'Uber, quoique avec la carte d'un autre établissement), sa réaction évoque également la question du changement de moyen de paiement dans une application qui s'ingénie à le faire oublier.

En effet, quand vous créez votre compte Uber, vous fournissez les coordonnées de votre carte une fois et vous n'en entendez plus jamais parler (jusqu'à son expiration) dans un usage courant du service. En pratique, la banque émettrice (comme le paiement lui-même) a donc totalement disparu de la transaction commerciale. Or cette perte de visibilité implique aussi qu'il devient beaucoup plus difficile pour une institution financière de prendre la place d'une concurrente dans le quotidien du consommateur.

Certes, le cas d'Uber peut paraître anecdotique (en attendant que son approche se répande sur d'autres secteurs d'activité). Mais la même logique est déjà à l'œuvre dans un environnement plus vaste : le paiement par smartphone. Bien sûr, avec Apple Pay (pour ne citer que le plus connu des porte-monnaie mobiles), le client peut enregistrer plusieurs cartes et choisir celle à utiliser pour chaque achat, mais il est évident que la simplicité du geste va conduire à privilégier celle définie par défaut, qui sera rarement changée.

Partenariat Uber + Chase

Même si elles ont une portée encore limitée (ne serait-ce que parce que, en France, les porteurs multi-cartes sont relativement peu nombreux), la désintermédiation peut donc avoir des conséquences immédiates sur les acteurs traditionnels et leur imposer de trouver des réponses spécifiques. Dans le cas de Chase, Bradley Leimer suggère par exemple de mettre en place des offres promotionnelles pour les clients qui paient leur course avec la carte de la banque, qu'ils soient nouveaux convertis à Uber ou non.

Plus généralement, des pans entiers de la relation client sont susceptibles d'être affectés, via la transformation des modes de sélection et des usages des services financiers. Dans ce registre, les solutions passeront impérativement par l'excellence de la connaissance du client, qui devrait donc constituer une priorité absolue. Cependant, la perspective à plus long terme est bien une perte de contrôle, quand les intermédiaires voudront tirer profit de leur position (imaginez Uber ou Apple mettant en concurrence les banques pour favoriser leur présence dans leurs applications).

Tandis que la notion de « banque plate-forme » – composée d'un assemblage personnalisé de services provenant de différents fournisseurs – émerge doucement, la réalité de la désintermédiation est en train de s'installer dans quelques marchés, révélant de plus en plus crûment la menace qu'elle représente. L'ère du déni va devoir prendre fin et des choix stratégiques vont devenir nécessaires sous peu…

mardi 19 juillet 2016

Essayer la banque avant de l'adopter ?

Moven
Vous n'imaginez pas acheter un vêtement sans l'essayer ? Vous n’achèterez jamais une voiture si vous ne pouvez pas en prendre le volant sur quelques kilomètres ? Pourquoi faudrait-il alors se résigner à choisir un compte bancaire à l'aveugle, en se basant uniquement sur les promesses d'un vendeur ou d'un comparateur en ligne ?

Telle est la question – tout à fait légitime au vu de l'engagement que représente la sélection d'une institution financière, parfois pour la vie – que pose la néo-banque américaine Moven, en lui apportant immédiatement une réponse, grâce à sa plate-forme mobile. Naturellement, il ne sera pas question de disposer d'une carte de paiement avant d'avoir ouvert un compte en bonne et due forme, mais les fonctions qui différencient fondamentalement son offre sont accessibles à tous, gratuitement et sans limitations.

En effet, la proposition de valeur de Moven réside principalement dans son approche d'analyse du comportement du client et de conseils personnalisés en vue de lui inculquer des pratiques plus saines. Or il suffit pour y goûter d'installer son application mobile et d'y « connecter » une carte existante (quel qu'en soit l'émetteur) pour commencer à profiter des avantages qu'elle procure au quotidien. Une fois convaincu, l'utilisateur n'aura plus qu'à souscrire à l'offre complète, toujours depuis son téléphone.

Certes, derrière cette formule sans engagement, il faut bien que certaines options soient réservées aux « vrais » clients afin de stimuler l'ouverture d'un compte (et fonder un modèle économique). En l'occurrence, les notifications de dépenses en temps réel, les retraits gratuits dans un vaste réseau de distributeurs, les capacités de transferts d'argent entre particuliers (sans frais non plus)… sont quelques exemples de services additionnels qui ne pourront être testés dans la version « autonome » de l'application.

Accueil Moven

En réalité, bien que Moven mette surtout en avant sa spécificité par rapport aux banques traditionnelles, sa démarche vise essentiellement à lever la difficulté à laquelle toutes les startups de la FinTech sont confrontées, de gagner la confiance des consommateurs et de les inciter à confier leur argent à une jeune entreprise sans notoriété et à l'avenir plutôt incertain. Et, pour ce faire, rien de tel que de démontrer concrètement la valeur délivrée, tout en réduisant au maximum les frictions de mise en œuvre !

Incidemment, le principe de « l'essai avant l'achat » pourrait également produire un bénéfice dérivé extrêmement utile (pour n'importe quelle banque). Ainsi, l'analyse du comportement financier de l'utilisateur des services avant qu'il n'ait souscrit le moindre produit représente une opportunité incomparable de connaître intimement le futur client et, de la sorte, lui suggérer d'emblée des solutions parfaitement adaptées à ses besoins et/ou déterminer objectivement son profil de risque.

Enfin, faut-il revenir sur le positionnement stratégique de Moven ? Voilà un acteur qui ne communique plus sur ses produits et services purement bancaires – qu'il estime, de manière plus ou moins explicite, totalement banalisés – et préfère axer son discours sur la maîtrise de leur bonne santé financière par ses clients. Il s'agit bien d'un début de transformation des modèles historiques, pointant vers un avenir dans lequel les outils financiers ne constitueront plus (enfin !) qu'un moyen et non une fin.

lundi 18 juillet 2016

Un chatbot bancaire pour les PME russes

Tochka
En quelques mois, les « chatbots » sont devenus la coqueluche des banques, qui capitalisent notamment sur l'ouverture de Facebook Messenger à leurs services. Si, jusqu'à maintenant, seuls les clients particuliers étaient visés, la russe Tochka s'adresse, elle, aux PME et cette stratégie n'est pas aussi incohérente qu'il y paraît.

Les fonctions que propose la filiale du groupe Otkritie grâce à son automate sont relativement classiques dans leur genre : après authentification de l'utilisateur, celui-ci pourra l'interroger pour obtenir le solde de ses comptes, rechercher un GAB à proximité de sa position courante, exécuter une demande de paiement…, mais également, dans un retour vers des interactions plus humaines, dialoguer avec un conseiller en centre d'appel, toujours dans la même conversation, sans jamais quitter la messagerie.

Tochka étant une banque en ligne pour les petites entreprises, l'idée de déployer ses services sur une plate-forme conçue pour (et utilisée par) les consommateurs peut sembler incongrue. En réalité, les responsables de PME sont non seulement des individus comme les autres, donc massivement adeptes de Facebook Messenger, mais, en outre, ils commencent à l'utiliser à titre professionnel, pour établir et maintenir le contact avec leurs partenaires, voire pour échanger avec leurs clients et leur vendre leurs produits.

Ainsi, l'intégration de la banque au cœur de la messagerie instantanée obéit-il à la même logique pour les PME que pour les particuliers : les clients y passent une grande partie de leur « vie en ligne », il est impératif de les y rejoindre. Loin de n'être que théorique, cette vision semble trouver un formidable écho parmi les entrepreneurs, puisque 12 000 d'entre eux ont utilisé le « chatbot » au cours de sa première journée de mise en service… et la moitié de ceux-là ont même réalisé une transaction de paiement !

Annonce Tochka

Un autre signe révélateur de l'existence d'une attente de la part des entreprises est à rechercher dans la manière originale dont la solution est née. En effet, c'est un client de Tochka – Angry Developers LLC – qui a imaginé et développé le « chatbot », en projetant ses propres besoins. La société a profité pour ce faire de la récente mise à disposition d'une API par la banque et a pu ensuite concrétiser son projet en moins de 2 jours. Voilà, au passage, une magnifique démonstration de la valeur que peut apporter une politique d'ouverture des services à des tiers…

Comme toujours, les banques placent la priorité de l'innovation sur la clientèle grand public, en considérant qu'elle en est plus demandeuse et, aussi (surtout ?), plus volage (encline à explorer la concurrence). Pourtant, les petites entreprises mériteraient tout autant de bénéficier des avancées « digitales » pour leur permettre de mieux gérer leurs affaires financières. Heureusement, des acteurs spécialisés se positionnent désormais pour combler les lacunes des institutions financières traditionnelles…

dimanche 17 juillet 2016

Des emojis pour aider à parler d'argent

Barclays
À l'occasion de la journée mondiale de l'emoji, ce dimanche 17 juillet, Barclays a créé un jeu d'expressions destiné à aider les britanniques à vaincre leur embarras naturel lorsqu'ils doivent parler d'argent. Au-delà de son côté anecdotique, n'y aurait-il pas là un moyen efficace d'accompagner l'éducation financière du grand public ?

L'idée est née d'un constat, formalisé par une enquête tout à fait sérieuse : fidèles à leur réputation de politesse extrême, les anglais confirment, pour 40% d'entre eux, avoir des réticences à aborder des questions d'argent. En pratique, leur réserve les conduit à préférer vider leur porte-monnaie plutôt que de réclamer le remboursement d'une dette (1 sur 5 estime avoir perdu plus de 100 livres en un an de la sorte) ou à participer à une activité avec des amis plutôt que d'avouer qu'ils n'en ont pas les moyens.

En parallèle, les personnes interrogées, surtout les jeunes (presque la moitié des 18-25 ans), considèrent que l'utilisation d'emojis – ces sortes de pictogrammes qui ont envahi les messageries instantanées – les aide à se sentir moins gênés dans leurs conversations. Alors, une équipe de Barclays a collaboré avec un professeur de linguistique afin de mettre au point quelques phrases toutes faites sous forme graphique : « désolé, je ne peux pas me le permettre », « c'est trop cher ! », « tu me dois de l'argent », « je suis fauché », « je ne veux pas diviser l'addition »…

Show me the mon-emoji!

Tout ce qui concerne l'argent fait appel à des ressorts psychologiques complexes chez l'être humain (et pas uniquement en Grande-Bretagne, évidemment !). En conséquence, des solutions un peu étranges peuvent être précieuses en vue d'influer sur les comportements et essayer d'inculquer les bases d'une bonne hygiène financière. La liste d'emojis de Barclays constitue l'une d'elles. Et plutôt que de la limiter aux échanges entre particuliers, ne serait-ils pas envisageable de l'introduire aussi dans la relation bancaire ?

Après tout, dialoguer avec un conseiller – à distance ou en face à face – fait également partie des expériences parfois difficiles et génératrices de frustrations (par exemple quand il faut traiter d'un découvert ou négocier un emprunt). Dans ces cas, l'adoption d'une autre forme de langage pourrait peut-être réduire certaines difficultés. À l'heure où les « chatbots » se répandent dans les outils de messagerie, la personnalisation des modes d'expression pourrait ainsi devenir un vecteur d'optimisation de la relation…

samedi 16 juillet 2016

Mondo mise sur le parrainage

Mondo
Après ses premiers pas en version alpha, puis beta (qui ont séduit plus de 10 000 volontaires), la néo-banque britannique Mondo s'apprête visiblement à passer à la vitesse supérieure. En effet, elle prépare une grande opération de conquête pour la rentrée prochaine, en direction des étudiants. Naturellement, son approche sort de l'ordinaire…

Premier constat, le choix de la cible ne doit rien au hasard. Les responsables de la startup ont déjà pu mesurer à quel point la proposition de valeur de Mondo – notamment son suivi des comptes en temps réel et par notification – trouvait un écho dans les campus universitaires. Cette tendance est validée à la fois par des données quantitatives – via l'analyse des bénéficiaires des premières cartes distribuées et des inscrits en liste d'attente – et par des retours qualitatifs – sur les forums ouverts aux utilisateurs.

Alors, afin d'encourager le mouvement, Mondo lance une vaste campagne de recrutement de « Campus Insiders », qui seront des ambassadeurs résidents, immergés au cœur des universités. Outre un rôle d'évangélisateur et de distributeur de son offre, leur mission consistera également à relayer auprès de la néo-banque les opportunités d'interventions – événements étudiants, clubs et associations… – et, plus généralement, à animer la communauté des clients-testeurs en vue de continuer à adapter les produits et services à leurs besoins.

#WhyMondo

En contrepartie de leur enthousiasme pour le projet de changer la banque, qui doit rester l'essentiel de leur motivation, Mondo promet à ses ambassadeurs une expérience unique dans une jeune pousse technologique et financière, à travers leur contribution aux événements qu'elle organisera sur les campus, leur implication forte dans sa feuille de route (y compris une rencontre à son siège), quelques cadeaux pour les parrains les plus actifs… et une place prioritaire pour faire partie de ses stagiaires en 2017.

La démarche de Mondo est brillante par sa manière de ré-introduire un peu de proximité dans la relation avec une banque mobile (contrairement au « banktruck » de Bee, dont le message sous-jacent est qu'il est impossible de se passer d'agence). Les « Campus Insiders » incarnent différemment le contact humain et la confiance nécessaires pour imposer un nouveau modèle, en passant non par des professionnels mais par des « pairs ». Quand on sait que les recommandations de la famille et des amis sont primordiaux dans le choix d'une institution financière, l'idée prend tout son sens…

vendredi 15 juillet 2016

Thought Machine réinvente le cœur de la banque

Thought Machine
Prenant l'exemple extrême des déboires retentissants de RBS en 2012, les fondateurs de Thought Machine soulignent l'inadéquation grandissante des systèmes informatiques vieux de 40 ans face aux enjeux de la banque du XXIème siècle. Leur réponse s'appelle Vault OS, qui veut devenir le socle des services financiers de demain.

Basée à Londres, l'entreprise a discrètement passé les deux dernières années à concevoir, développer et mettre au point sa solution en partant d'une feuille blanche, avec une équipe de 50 personnes menée par des anciens de Google. Révélé depuis peu, le résultat ne peut donc qu'attirer l'attention. Il se présente comme un « système d'exploitation » bancaire particulièrement riche et robuste, et dont la flexibilité et la capacité d'évolution doivent lui permettre de supporter tous les défis futurs.

Sur le plan purement technique, d'abord, Vault OS est (évidemment) hébergé dans les « nuages » (informatiques), ce qui lui permet de garantir une montée en charge linéaire et transparente – notamment pour supporter une croissance rapide, de quelques clients à plusieurs millions – sans jamais avoir à se préoccuper des questions sur l'infrastructure – de son coût (d'investissement), de sa maintenance, de l'anticipation des besoins (pour répondre à des pics d'activité qui ont une faible probabilité de se produire)…

Je serai plus réservé sur les prétentions d'utilisation de blockchain et de contrats intelligents (« smart contracts »), qui paraissent surtout tenir d'une stratégie de communication. Il n'est cependant pas exclu que ces concepts apportent tout de même une valeur différenciante, si, par exemple, ils sont mis à profit pour améliorer la transparence et le partage de l'information ou en vue de faciliter la création de nouveaux produits bancaires grâce à un langage spécialisé (une idée qui fait par ailleurs l'objet d'une initiative indépendante, récemment expérimentée par State Street).

Vault OS

Dans un registre plus proche du métier, la plate-forme est prête à prendre en charge tous les produits traditionnels – compte courant ou d'épargne, carte de crédit, prêt hypothécaire… – et ceux que ses utilisateurs imagineront, dont l'éditeur promet que la mise en œuvre et le déploiement pourront se faire en quelques jours. Détail important, les exigences réglementaires sont intégrées nativement, à travers, entre autres, la production de rapports de gestion des risques ou de conformité aux seuils de capital bâlois.

En attendant l'invention de nouveaux produits, Vault OS comprend déjà un certain nombre de fonctions avancées. La catégorisation automatique des transactions – douée de capacités d'auto-apprentissage – permet à la banque non seulement de fournir au client final une vue différente de ses finances mais également de connaître son comportement, de manière à lui offrir une relation réellement personnalisée. Cette faculté sera encore renforcée par la possibilité d'agréger simplement des comptes existants.

Enfin, tous les services sont accessibles sous forme d'API (interfaces de programmation applicative), afin d'en faciliter l'exploitation aussi bien par les équipes (internes) chargées de réaliser les applications destinées aux conseillers ou aux clients que par les développeurs externes et autres partenaires auprès de qui elles peuvent être aisément mises à disposition, dans une logique d'innovation ouverte.

En synthèse, Vault OS représente ce que pourrait être, au moins dans son cœur, la banque Google qui fait l'objet de tellement de fantasmes. De ce point de vue, elle ne déçoit pas, ne serait-ce que par ses principes fondamentaux (cloud, API, extensibilité…), dont il ne reste qu'à voir la concrétisation. Le plus difficile pour Thought Machine sera toutefois de conquérir des clients, en dehors, peut-être, de la génération montante des néo-banques : les établissements qui n'ont pas encore osé moderniser leurs systèmes historiques n'auront sans doute pas le courage de s'engager dans une telle révolution !

jeudi 14 juillet 2016

AXA crée l'assurance des nouveaux usages

AXA
Avec l'apparition des nouveaux usages autour de l'automobile, les compagnies d'assurance ont été promptes à proposer des solutions adaptées aux acteurs de cette économie collaborative émergente. Aujourd'hui, AXA aborde le sujet sous un angle différent, en commercialisant une solution centrée sur les besoins du consommateur.

Auto-partage, co-voiturage, emprunt impromptu ou organisé, location auprès d'un particulier ou d'une société spécialisée…, les options disponibles au moment de préparer un déplacement sont extrêmement variées, les modes alternatifs rencontrant un succès considérable aux quatre coins de la planète. Or, si chacune d'elles s'accompagne d'une couverture plus ou moins formelle, il est parfois difficile d'en connaître les conditions d'application et il s'avère souvent que les services offerts sont limités.

En réponse à ces incertitudes, AXA lance un contrat destiné avant tout à garantir la tranquillité d'esprit de ses clients. En effet, avec « Ma Mobilité Auto » – à souscrire pour 24 heures, un week-end, une semaine, un mois ou un an –, l'assuré bénéficie d'une protection étendue (blessure ou décès du conducteur, assistance en cas de panne ou d'accident et recours juridique) pendant tous ses trajets dans un véhicule « étranger », quel qu'en soient les circonstances (jusqu'au co-voiturage en tant que passager).

Assurance « Ma Mobilité Auto » AXA

À ce stade, il faut tout de même souligner une déception, puisque la page de présentation de l'offre se termine par cette invitation : « pour souscrire, rendez-vous en agence AXA ! ». Que le point de vente physique reste un canal de vente, soit. Mais qu'il constitue la seule possibilité – surtout pour un produit conçu pour des individus ancrés dans le monde « digital » et qui, de surcroît, peut être souscrit pour une journée – est pour le moins surprenant ! Espérons que cette restriction ne sera pas définitive…

Quoi qu'il en soit, AXA dessine avec « Ma Mobilité Auto » une évolution des modèles traditionnels de l'assurance, en proposant une transition de son objet du véhicule à la personne, susceptible de devenir la norme à l'ère (prochaine) de la voiture autonome. Plus largement, l'initiative pourrait également être considérée comme un tout premier pas vers une future couverture contextuelle et personnalisée, englobant à la fois le transport et les autres situations de la vie quotidienne, un peu comme l'imaginait Celent récemment. Dans cette optique, il reste cependant encore quelques progrès à accomplir…

mercredi 13 juillet 2016

AmEx se lance dans le crédit aux PME

American Express
À mi-chemin entre les banques traditionnelles et les nouveaux entrants du prêt en ligne, American Express devrait lancer prochainement – selon un récent article de Bloomberg – sa propre solution de crédit aux petites entreprises, en tentant de rassembler sous un seul toit les avantages respectifs des deux camps : technologie et confiance.

Bien entendu, l'information peut paraître banale au regard du métier historique de l'institution, puisque ses cartes de crédit (justement) sont déjà largement distribuées auprès des professionnels comme des particuliers. L'évolution n'est pourtant pas anodine et étend sensiblement son champ d'action, grâce à des prêts classiques proposés à des conditions compétitives – de 1 000 à 750 000 dollars sur 90 jours (moyennant 1,5% d'intérêts) ou 30 jours (à 0,5%), mis à disposition sous 48 heures.

Face à des startups telles que Square ou OnDeck, positionnées sur le même créneau, le service d'American Express, s'il tient ses promesses, se révèlerait ainsi (presque) aussi facile d'accès tout en étant beaucoup plus abordable. Surtout, la société peut espérer capitaliser sur une relation intime et souvent ancienne avec ses clientes PME aux États-Unis ainsi que sur une excellente image de marque, synonyme de confiance, qui représentent des avantages concurrentiels incomparables dans le secteur financier.

La connaissance de ce segment de clientèle spécifique fait d'ailleurs certainement partie des premières qualités qui permettent à American Express de développer sa solution avec tant d'efficacité. Grâce à un processus de souscription simplifié et une meilleure réactivité, cette dernière peut constituer une menace autrement plus importante pour les banques que celle que font peser de jeunes pousses inconnues – qui, en outre, sont fréquemment ouvertes à des partenariats, à l'instar d'OnDeck avec BBVA Compass.

Cette initiative attire l'attention sur l'émergence de nouvelles formes de concurrence pour les institutions financières, qui dépasse la seule bataille entre les acteurs en place et la FinTech, sans attendre l'entrée en piste redoutée des géants du web. Des entreprises de secteurs plus ou moins proches sont également à l'affut des opportunités que leur procure la technologie pour apporter la disruption dans les banques, avec des visions, des approches et des atouts différents, qui les rendent aussi crédibles qu'imprévisibles.

Carte American Express Business

mardi 12 juillet 2016

Le mythe des économies par la blockchain

Blockchain et réduction de coûts
Parmi les arguments qu’avancent les banquiers pour justifier leur récente passion pour la blockchain, aucun n’est plus fréquemment cité que les économies qu’elle doit leur permettre de réaliser. Hélas, il s’agit d’un mythe, qui tient à la fois d'une analyse faussée et d'une vieille tradition de croyance à l'existence de solutions magiques…

Bien entendu, l'illusion de l'optimisation des coûts ne sort pas de nulle part. Son origine est à rechercher dans le fonctionnement du bitcoin, première application de grande ampleur de la blockchain. Il est vrai que, depuis ses origines, la crypto-devise est systématiquement présentée comme un instrument de paiement – voire d'échange de valeur en général – particulièrement efficace et bon marché. Or, si cette perception est correcte d'aujourd'hui, elle évoluera certainement à l'avenir.

Les mécanismes économiques et technologiques sous-jacents de bitcoin sont en effet conçus de manière à assurer en permanence un équilibre entre l'offre et la demande, sur différents plans. Une conséquence de cette caractéristique est d'entraîner presque automatiquement une augmentation des coûts des transactions au fur et à mesure de la progression de la maturité et des usages de la monnaie, ou de sa blockchain. La quasi-gratuité actuelle n'a donc pas vocation à perdurer jusqu'à la fin des temps…

Mais ce n'est pas là l'erreur de jugement la plus grave qui puisse être commise. Ainsi, l'idée – largement répandue dans une multitude d'institutions financières à travers le monde entier – que la mise en œuvre d'une blockchain privée ou semi-privée (partagée entre les banques, par exemple) pourrait être une source d'économies est aussi absurde qu'impardonnable : il suffit de se souvenir que le concept technique suppose une duplication massive des traitements et du stockage pour le comprendre !

Comment peut-on croire un instant que la démultiplication des infrastructures peut être moins onéreuse qu'un système centralisé ? Même les défenseurs de bitcoin admettent que la seule consommation électrique du réseau de machines qui le sous-tend est un facteur de coûts susceptibles de poser des difficultés à terme. Et, dans les banques, le problème est singulièrement exacerbé par l'incapacité de la plupart d'entre elles à optimiser leurs coûts informatiques (matériels, logiciels et humains) de base.

Car le fond du débat est bien là et, cette fois, il concerne aussi bien les projets autour de blockchains privées que sur celle du bitcoin (ou d'Ethereum ou de toute autre crypto-devise). Dans tous les cas, les acteurs persistent à croire naïvement que l'adoption d'une nouvelle technologie va résoudre leurs problèmes budgétaires, alors que ceux-ci sont principalement dus à des modèles d'organisation et de fonctionnement opérationnel déficients qu'ils ne cherchent jamais à remettre en cause.

Continuer à privilégier les solutions propriétaires hors de prix face aux outils banalisés accessibles gratuitement ou à peu de frais, à gérer la fiabilité et la robustesse par des méthodes ancestrales plutôt que par la redondance généralisée, à multiplier les strates dans la chaîne de commandement avec leurs lourdeurs administratives et leurs coûts incompressibles… sont quelques exemples des défauts qui devront être résorbés avant d'espérer faire des économies grâce à la blockchain… ou toute autre innovation.

Surtout, arrêtons d'attendre des miracles à chaque nouveau concept émergent : le changement dans l'entreprise, quel qu'il soit, ne peut se produire qu'à condition d'y consacrer des moyens et des efforts, d'autant plus conséquents que l'ambition est élevée. Et, dans la plupart des cas, la première étape consistera à renverser les habitudes et transformer la culture interne, bien avant d'installer les derniers outils à la mode…

Lutin

lundi 11 juillet 2016

Des chasseurs de prime dans la banque

White Hat Hacker
La démarche est répandue dans toutes les grandes entreprises du web et elle commence même à trouver ses entrées au Pentagone. Pourtant, l'idée d'inviter des « gentils pirates » à rechercher les failles de leurs services – moyennant un programme de prime au résultat – n'est pas encore parvenu à séduire toutes les institutions financières.

Selon un article de la revue American Banker, il est même des banquiers qui ignorent l'existence de telles possibilités pour renforcer la sécurité de leurs systèmes. À l'inverse, bien évidemment, les nouveaux entrants du secteur – PayPal, Square, Simple… – en sont familiers, mais Western Union fait aussi partie des adeptes identifiés. Tous font état d'une même approche pragmatique : quoi qu'ils fassent, les hackers ne les attendent pas pour éprouver leurs protections, alors mieux vaut envisager une collaboration, plus productive.

Même sans cette sorte de résignation, le fait de pouvoir compter sur une communauté composée de milliers de chercheurs (plus ou moins officiels), aux points de vue et méthodes divers, permet de détecter des anomalies qui, autrement, passeraient longtemps inaperçues. Dans le cas de PayPal, par exemple, plus de 1 500 experts de 80 pays ont participé au programme et se sont partagés des récompenses de 50 à 15 000 dollars, pour un total de 2 millions de dollars, depuis sa mise en place en 2012.

L'argent n'est pas la seule motivation des contributeurs. Ainsi, le trublion des paiements tient une liste publique des découvertes et cette reconnaissance de leurs travaux est également une source de motivation pour les chercheurs. En outre, la formalisation de la relation avec des intervenants externes est un excellent moyen d'instaurer la confiance, en évitant les conflits qui surgissent en cas de publication « sauvage » ou les délais de prise en compte lorsque les processus ne sont pas standardisés.

Contrairement à PayPal, qui reste relativement ouvert sur la provenance des rapports de sécurité qu'il reçoit, Western Union opère son programme par l'intermédiaire de la plate-forme BugCrowd, qui réalise un filtrage a priori des candidats à la recherche de problèmes de cybersécurité. Synack, autre solution basée sur un modèle fermé similaire, compterait elle-même plusieurs institutions financières parmi ses principaux clients. Cette option paraît certainement plus rassurante (notamment pour débuter) mais elle a l'inconvénient de limiter singulièrement la portée de la démarche.

En synthèse, il en est de la sécurité comme de l'innovation : se cantonner aux talents internes (et à quelques outils spécialisés) n'est plus suffisant, il devient désormais indispensable de faire appel à des contributeurs externes, dans une logique d'ouverture aussi large que possible (pour en assurer l'efficacité) et d'autant plus facile à accepter que les candidats potentiels sont, selon toute vraisemblance, déjà à l'affût des failles et qu'il n'est pas besoin de déployer d'immenses efforts pour tirer parti de leurs qualités…

Coffre

dimanche 10 juillet 2016

Et ING devint une entreprise technologique…

ING
Toutes les banques du monde parlent d'agilité et quelques-unes commencent même à prendre conscience qu'elles sont avant tout des entreprises technologiques. Pour le groupe ING, cette vision est désormais devenue une réalité, dont son DSI, Ron van Kemenade, aime à décrire le parcours, initié en 2010 et qu'il estime n'avoir pas de fin.

L'histoire de cette trajectoire commence avec l'ambition stratégique de délivrer une expérience client différenciante. Or, avant de viser cet objectif, une analyse objective de la situation existante dans le département informatique d'ING a révélé un certain nombre de handicaps : la croyance que la technologie est banalisée et qu'elle peut être maîtrisée par n'importe qui, la gestion de la qualité exclusivement par l'adhésion aux processus, l'adoption d'un rôle de fournisseur vis-à-vis des interlocuteurs métier (clients internes)…

À la lecture de la liste des défauts identifiés, la plupart des banques risquent de se reconnaître, encore en 2016 : la multiplication des partenaires et sous-traitants, jusqu'à ne plus savoir qui solliciter en cas d'incident, la séparation des responsabilités érigée en système, qui isole les acteurs les uns des autres (entre métier, développement, production…) et devient source d'inefficacités et de travail manuel, la perception de l'informatique comme un centre de coûts dont la seule priorité est de réduire le budget…

La réponse d'ING à ces défis a débuté par la reconnaissance de la valeur de la technologie pour son activité et par le développement d'une nouvelle culture de l'ingénierie logicielle, dont une des clés est le besoin d'une forte expertise interne. L'exemple a été d'abord donné avec la mise en place d'une équipe de développement mobile, placée au cœur du siège de la banque et opérant en mode « guérilla », de manière à stimuler une propagation organique du mouvement dans toute l'entreprise.

La transformation agile d'ING

Naturellement, la transformation n'a pas été sans soulever de graves questions. Très rapidement, le DSI d'ING a dû remettre en cause sa politique de recrutement et de formation (ainsi que les modèles d'externalisation) afin d'adapter les compétences disponibles à la vision proposée. Sur le plan technologique, les systèmes historiques représentent un challenge spécifique, en partant du principe qu'ils ne peuvent être écartés de la dynamique de changement : jusqu'à quel point peuvent-ils intégrer une approche agile et à quel moment faut-il impérativement envisager leur remplacement ?

Plus important encore, la réalisation de la nécessité d'une évolution parallèle du côté des métiers a des conséquences sur l'ensemble de l'organisation. Au-delà de la seule implication dans la conception des solutions logicielles, la perspective retenue est d'impliquer les (ex-)clients internes dans le cycle complet de distribution. C'est ainsi qu'une démarche dite « BizDevOps », inspirée par les méthodes en vigueur chez Spotify [PDF], maintient un lien direct entre tous les intervenants (techniques et humains) concernés par les projets, sur toute leur étendue, de la conception à la livraison.

Six ans après le début de l'aventure, la maturité a considérablement progressé. Aux Pays-Bas, ING est en plein déploiement de son approche « BizDevOps » (l'alignement « DevOps » entre développement et production y est déjà intégralement généralisé), tandis que, dans le reste du monde, la transition agile est finalisée à 70%. Sur le plan des ressources humaines, considéré comme le plus critique de la stratégie, plus de 500 nouveaux ingénieurs logiciels ont été recrutés. Mais, en dépit de ces avancées, le dernier message de Ron van Kemenade est qu'il reste toujours des améliorations possibles…