Free cookie consent management tool by TermsFeed
C'est pas mon idée !

lundi 31 juillet 2017

Pas facile de gérer les retours des clients…

AXA
Quand les consommateurs réclament plus de transparence, une des réponses les plus courantes des commerçants et autres fournisseurs consiste à collecter et publier leurs avis et commentaires sur les produits et services qu'ils achètent. Cette pratique reste pourtant rare dans les services financiers, aussi AXA fait-elle figure d'exception…

Après des déploiements successifs dans plusieurs pays (en France, depuis 2016, notamment), la compagnie d'assurance vise en effet à déployer un dispositif homogène dans l'ensemble de ses entités d'ici à la fin de cette année. Le mode opératoire, piloté par des prestataires spécialisés (eKomi dans la plupart des pays), est tout à fait classique : après une interaction, le client est interrogé sur son expérience, à laquelle il attribue une note (de 1 à 5 étoiles) et, s'il le souhaite, ses remarques particulières.

Une équipe de modération contrôle les contenus soumis (afin d'éviter la diffusion de données personnelles ou, j'imagine, de propos injurieux et autres excès). Ils sont ensuite mis en ligne sur le site web de la filiale concernée, où tous les visiteurs, clients ou prospects, peuvent les consulter librement. La démarche ne s'arrête cependant pas là. Ainsi, toutes les notes inférieures ou égales à 3 étoiles sont considérées comme des marques de mécontentement et font l'objet d'un suivi spécifique, selon une responsable.

Ces dossiers sont donc pris en charge par une équipe dédiée aux réclamations des assurés, jusqu'à une résolution satisfaisante pour toutes les parties. À la fin de ce processus, les réponses apportées sont également publiées aux côtés des appréciations. Du moins est-ce la théorie. Car, à y regarder de près, beaucoup de plaintes de clients sur le site français ne comportent aucun retour de la part d'AXA, même après plusieurs semaines (essentiellement dans le traitement des sinistres, sans surprise)…

Avis clients AXA France

Néanmoins, l'initiative de l'assureur représente indubitablement un exemple à suivre. Le commerce en ligne a depuis longtemps démontré que la présence d'opinions de pairs sur les produits et services que convoitent les visiteurs sont générateurs de confiance et contribuent à l'amélioration des ventes, y compris quand certaines sont négatives (ils peuvent alors éventuellement en relativiser l'importance par rapport à leurs propres attentes) et surtout quand elles sont « certifiées » par un organisme tiers.

Enfin, le recueil des avis a un autre objectif : il livre un aperçu direct des douleurs ressenties par les clients dans leur relation avec la compagnie. Elles sont autant d'opportunités non seulement de tenter de rectifier le tir pour les personnes insatisfaites mais aussi d'identifier des axes d'améliorations possibles dans les processus. Dans les deux cas, la visibilité sur les actions entreprises devrait être un impératif. En l'occurrence, l'approche d'AXA France est décevante : la note moyenne de 4,7 n'exclut pas que les quelques défauts signalés exigent une solution, même si ce n'est pas toujours simple…

dimanche 30 juillet 2017

Comment inspirer une culture « digitale » ?

BBVA
Toutes les institutions financières sont désormais engagées dans une transformation « digitale » et les plus sérieuses comprennent que, derrière cette expression, il n'est pas uniquement question de nouvelles technologies. La culture d'entreprise, notamment, en est une autre composante essentielle. Mais comment la faire évoluer ?

Un exemple d'approche raisonnée et extensive nous est proposé – encore une fois (mais faut-il s'en étonner ?) – par BBVA, via la voix de son responsable « des talents et de la culture », Ricardo Forcano. Il aborde ainsi l'importance de compléter l'engagement de tous les collaborateurs dans la démarche, dont les plus haut niveaux de management, par une stratégie active en matière de ressources humaines. Et il nous explique comment cette fonction doit elle-même se réinventer, et pas seulement par son intitulé.

En effet, une organisation « digitale » – plus agile, plus rapide, plus réactive, plus empathique – requiert une adaptation à de nouveaux modes de travail, dont les impacts sont considérables et doivent donc être accompagnés. En particulier, l'exécution des projets ne se satisfait plus des structures hiérarchiques rigides traditionnelles : à chaque étape, il faut être en mesure d'assembler une équipe autonome optimale, composée des experts nécessaires à chaque tâche, pour la durée utile à son accomplissement.

Ce modèle dynamique induit à son tour le besoin de changements radicaux, affectant la manière dont la gestion des talents (ou des ressources humaines) est animée. L'affectation des collaborateurs aux projets ne peut plus se contenter de suivre des processus structurés autour de l'organigramme de l'entreprise : une place de marché des compétences et des qualifications (ouverte et transparente) devient le centre du dispositif et ses algorithmes intelligents contribuent à l'attribution des missions.

Sur cette plate-forme, la notion de collaborateur se métamorphose aussi. Elle recouvre désormais de multiples formes d'implication, qui font du salariat à plein temps une formule parmi d'autres – travail indépendant, accompagnement à temps partiel, communautés publiques (de type Kaggle)… Cette diversification est inéluctable car elle répond à une demande exprimée par une partie des actifs tout en offrant à l'entreprise une richesse supplémentaire dans la recherche de la bonne personne pour le bon rôle au bon moment.

Naturellement, une telle perspective soulève d'innombrables questions sociétales. À leur niveau, les ressources humaines ont leur part de responsabilité. La formation est l'une des plus critiques : non seulement la pluridisciplinarité devient indispensable dans tous les domaines d'activité mais l'accélération des mutations, dans tous les secteurs, impose une actualisation permanente. Dans cette logique, l'apprentissage continu constitue un avantage concurrentiel face à un véritable risque d'obsolescence des compétences.

Comment ces recommandations influent-elles sur la culture d'entreprise ? En concourant à donner un sens à l'action individuelle de chaque collaborateur, inscrit dans une vision commune, partagée. Quand tous se sentiront investis d'une mission personnelle au service (ultime) des clients et auront à cœur de participer concrètement à l'atteinte des ambitions de l'organisation, la transformation « digitale » aura (enfin) progressé.

Ciudad BBVA

samedi 29 juillet 2017

Une université adopte l'app favorite des étudiants

ABN Amro
Au début de cette histoire, ABN Amro lançait Tikkie, une solution (pas tout à fait) de paiement pour les plates-formes de messagerie sociale (WhatsApp, Telegram, Facebook Messenger…). Un an plus tard, les jeunes se sont appropriés le service et l'université de Groningen surfe sur sa popularité pour accélérer le recouvrement des frais de scolarité.

Les idées les plus simples sont parfois les plus efficaces. Avec Tikkie, accessible (gratuitement) à tous les néerlandais, qu'ils soient clients ou non d'ABN Amro, la seule action possible est de solliciter un paiement auprès d'un contact. À chacune de ces demandes est joint un lien web grâce auquel le destinataire peut régler sa dette en quelques gestes (tous les détails de la transaction étant pré-remplis) sur le site de sa banque (quelle qu'elle soit), via le système de place existant iDEAL.

De leur côté, les responsables de l'université font, depuis longtemps, face à une difficulté récurrente : bien que les frais de scolarité soient généralement payés par prélèvement automatique, les rejets sont fréquents, au risque de perturber le cursus des personnes concernées. La solution était évidente. Dorénavant, en cas d'incident de ce genre, une demande de régularisation est émise avec Tikkie. L'étudiant peut alors verser son dû immédiatement (ou transférer le message à ses parents pour qu'ils s'en chargent).

Tikkie

Dans le principe, il ne s'agit que d'envoyer une relance, triviale. Pourtant, dans sa forme, l'utilisation de la solution d'ABN Amro apporte quelques avantages significatifs. Outre son instantanéité, la réception de la demande par l'intermédiaire d'un outil familier, utilisé massivement par les jeunes, est en effet le meilleur moyen de communiquer avec cette population et, bien sûr, la connexion directe et simplifiée avec un service de paiement populaire, disponible pour tous, offre des conditions idéales pour cet usage.

À travers cette expérience, Tikkie démontre comment la création d'une application d'échange d'argent entre particuliers peut susciter de nouvelles opportunités. En son temps, Barclays l'avait déjà constaté, au Royaume-Uni, avec son porte-monnaie mobile Pingit, mais la leçon ne semble pas avoir été entendue ailleurs. Il « suffit » parfois de partir d'un concept simple, de laisser émerger les idées, en les encourageant quand cela s'avère nécessaire, et les possibilités commencent à se multiplier spontanément…

vendredi 28 juillet 2017

Huguette accompagne les crédits de Natixis

Huguette
Parce que, en France, la carte de crédit reste une exception, Natixis Financement a créé Huguette, une application mobile originale destinée à accompagner la solution de crédit à la consommation distribuée dans les réseaux Banque Populaire et Caisse d'Épargne et aider leurs clients à satisfaire leurs envies et leurs besoins en quelques gestes du doigt.

Ainsi, plutôt que de se présenter comme un outil financier, Huguette propose à son utilisateur de décrire l'objet convoité, en prenant une photographie. Il pourra ensuite, bien entendu, préciser son prix (dans la limite de sa ligne de crédit) et, dès lors, obtenir une proposition de financement, déclinée en 3 options de durées distinctes, entre 4 et 18 mois. Une sélection et une confirmation plus tard, l'opération est terminée et les fonds versés sur son compte courant, sous 48 heures (ce qui paraît bien long…).

L'application comporte en outre un ensemble de fonctions complémentaires, pour une maîtrise complète du crédit. Avant souscription, s'il souhaite s'accorder un délai de réflexion, le client peut enregistrer sa demande dans ses favoris et la reprendre à tout moment. Après signature, outre la consultation des encours et des échéances à venir, il a aussi la possibilité de décaler un versement (sur une période de 2 semaines), faire une pause (d'un mois, dans la limite de 2 par an) ou procéder à un remboursement anticipé.

Autre particularité, plutôt surprenante, l'application adopte un positionnement non conventionnel dans l'univers mobile, puisque son nom et son image font référence à un personnage de grand-mère. L'objectif est probablement d'associer une présence familière rassurante au crédit à la consommation – notamment vis-à-vis de jeunes adultes. L'idée paraît cependant hardie car la sagesse de la personne âgée n'est pas nécessairement compatible avec des produits financiers, dans l'imaginaire collectif.

Application Huguette

Il reste enfin à signaler l'existence d'une version spéciale de Huguette pour les conseillers. Toujours selon la même logique pédagogique, décidément omniprésente dans cette initiative, elle permet à ces derniers de réaliser des démonstrations interactives concrètes, dans un environnement complet et entièrement opérationnel (alimenté par des données fictives). Pour une fois, au-delà du discours, les prétentions d'une banque à développer la culture numérique de ses clients font l'objet d'un effort spécifique !

En synthèse, Huguette représente une combinaison extrêmement judicieuse d'accompagnement didactique (sur un domaine relativement sensible) et d'approche centrée sur le client (et ses attentes). La démarche mériterait cependant d'être élargie : pourquoi, par exemple, l'accès au report d'échéance est-il rattaché au détail des opérations, au lieu d'être guidé, lui aussi, par l'expression d'un besoin (« je fais face à une difficulté passagère, comment la surmonter ? ») suivie d'une solution personnalisée ?

jeudi 27 juillet 2017

Les ICO rattrapées par la réglementation

SEC
En quelques mois, les « Initial Coin Offerings » (ICO) sont devenues la nouvelle coqueluche des amateurs d'Ethereum. Comme il fallait s'y attendre, les dizaines de millions de dollars investis dans certaines de ces opérations attirent l'attention des régulateurs. La SEC américaine est la première à vouloir mettre de l'ordre dans cette jungle.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, rappelons brièvement le principe de l'ICO, qui offre un système de financement efficace et original aux startups dont le modèle repose sur une application de la blockchain. Concrètement, les fondateurs émettent des « jetons » sur un marché ouvert où ils se négocient généralement contre des crypto-devises (notamment l'Ether). Ces « jetons » représentent parfois un équivalent de parts de l'entreprise (voire de ses bénéfices futurs) ou, plus fréquemment, la monnaie virtuelle avec laquelle sera payée l'utilisation de la solution qu'elle développera.

Alors que les innovations qui entourent les réseaux Bitcoin, Ethereum et consorts, bien que surveillées attentivement, bénéficient d'une large tolérance de la part des autorités dans la plupart des régions du monde, la « Securities and Exchange Commission » (SEC) s'est inquiétée de l'affaire de « The DAO », survenue en juin 2016. Après étude attentive de ce cas très médiatisé – dont l'objet, sans être exactement une ICO, était une sorte de fonds de capital risque décentralisé –, elle vient donc de livrer ses conclusions.

En synthèse, le gendarme de la bourse considère que la mise sur le marché et l'échange organisé d'actifs numériques (les « jetons ») par des structures virtuelles tombent sous le coup des lois existantes relatives aux titres et actions. Cette décision ne peut constituer une réelle surprise quand une bonne partie des défenseurs du concept d'ICO le présentent comme un moyen non réglementé de lever des fonds publics. Au vu des montants en jeu, la SEC rappelle simplement son rôle de protection des investisseurs.

La principale conséquence de cette prise de position est d'imposer aux émetteurs – que le régulateur invite à se rapprocher d'elle – de se conformer aux exigences légales d'information claire et transparente des acquéreurs potentiels. Or il est indéniable qu'il s'agit effectivement de la carence la plus critique et la plus dangereuse des ICO actuelles. Même en laissant de côté les (nombreuses) escroqueries pures et simples, la présentation des projets est rarement suffisante pour procurer aux investisseurs tous les éléments indispensables à une prise de décision objective et éclairée.

Apparemment, quelques plates-formes d'émission ou d'échange de « jetons » ont réagi en interdisant leur accès aux citoyens des États-Unis. Ce ne peut être qu'une solution de court terme, car il est vraisemblable que les autres régulateurs nationaux tendront à appliquer le même raisonnement. Peut-être certains prendront-ils l'(heureuse) initiative d'adapter leur approche existante aux spécificités des ICO. En attendant, l'incertitude va régner sur les opérations et la prudence restera de mise pour les investisseurs.

Déclaration du président de la SEC

mercredi 26 juillet 2017

Plus de transparence sur les services bancaires !

FCA
Quand les consommateurs, convaincus que toutes les offres se valent, renoncent à changer de banque, la concurrence ne joue plus. Afin d'assainir la situation, après avoir œuvré à rendre la comparaison des prix plus objective, le régulateur britannique enfourche maintenant un nouveau cheval de bataille : la transparence sur le service.

Le besoin est évident : au moment de sélectionner un établissement pour ouvrir un compte courant, la grille tarifaire constitue un critère essentiel mais il n'est pas le seul. La « Financial Conduct Authority » (FCA) a donc commandité une vaste enquête [PDF] pour mieux connaître les attentes des clients vis-à-vis des institutions financières, en matière de fiabilité, de sécurité, de communication, de simplicité des démarches… Son objectif était d'identifier les indicateurs qu'ils considèrent les plus importants.

Fort des résultats obtenus, l'organisme vient de lancer la deuxième étape de son initiative, sous la forme d'une consultation publique. Celle-ci appelle aux commentaires sur sa proposition d'imposer aux offreurs de comptes courants (pour les particuliers et les entreprises) de diffuser à intervalles réguliers des informations de qualité de service, de manière à offrir des moyens de comparaison toujours plus riches. Pour l'instant, 5 points de mesure spécifiques sont retenus dans ce cadre, parmi les plus de 30 envisagés.

Les banques seraient ainsi contraintes de révéler le temps moyen d'ouverture d'un compte (et de mise en place des options associées), de remplacement d'une carte de débit (en cas de perte, vol…), d'entrée en vigueur d'une procuration, les moyens et horaires d'accès à diverses transactions (virement, annulation de chèque…) et le nombre et le type d'incidents majeurs de sécurité subis. Bien sûr, cette liste soulève la question, non adressée à ce stade, du contrôle de la sincérité des déclarations

Comme elle en a désormais pris l'habitude (avec son initiative midata), la FCA ne se contente pas de souhaiter une publication de ces informations qui soit facilement accessible à tous. Elle demande explicitement que les données soient également utilisables par des plates-formes de comparaison d'offres et autres tiers. Outre son ambition de stimuler la concurrence, elle estime que la visibilité donnée aux indicateurs de qualité de service devrait aussi inciter les banques à agir pour leur amélioration.

Dans une époque qui en fait pourtant une valeur primordiale, la transparence reste largement absente des institutions financières. Il ne faut donc pas s'étonner qu'un régulateur s'empare du sujet et leur force la main. L'autorité de la concurrence l'incite d'ailleurs à intervenir sur plusieurs autres sujets tout aussi critiques, par exemple sur les frais de découverts. Hors du Royaume-Uni, à défaut de contraintes, les nouveaux entrants de la FinTech peuvent également contribuer à éradiquer les traditions d'opacité…

Rapport d'enquête sur les indicateurs de qualité de service bancaire

mardi 25 juillet 2017

AXA lance une assurance instantanée

AXA
S'adapter au monde moderne, dans lequel tous les services doivent être personnalisés, accessibles instantanément, partout et à tout moment, du bout des doigts, est une exigence que les compagnies d'assurance doivent elles aussi prendre en compte. AXA Italie s'y attelle grâce à une collaboration avec une jeune pousse de l'InsurTech, Neosurance.

Les deux partenaires viennent ainsi de lancer « Al Volo » (« au vol »), un contrat résolument classique – une assurance voyage, comprenant une assistance 24x7 et un remboursement des frais médicaux – dont la double originalité réside essentiellement dans son mode de commercialisation. Sa première particularité est en effet d'être distribué auprès de la communauté d'utilisateurs de la plate-forme TiAssisto24, une sorte de conciergerie prenant en charge les petits tracas quotidiens de l'automobiliste.

L'avantage de cette intégration est qu'elle ouvre un accès à des informations sur les participants et sur leur contexte. Exploitées par la technologie de Neosurance (inévitablement présentée comme de l'intelligence artificielle…), celles-ci permettent alors de déterminer automatiquement, entre autres par la détection de déplacements à l'étranger (?), l'opportunité de proposer un produit, spontanément, au bon moment, et d'en ajuster les conditions selon le besoin réel identifié (le pays de destination, par exemple). Si le client accepte l'offre suggérée, il finalise ensuite la souscription en trois clics.

Al Volo

Pour ses concepteurs, l'approche retenue avec « Al Volo » a vocation à devenir la règle plutôt que l'exception. L'ambition est de mettre des solutions d'assurance à disposition de tiers (dans tout secteur), qui n'ont plus qu'à les inclure dans leurs offres pour garantir la tranquillité d'esprit de leurs clients. Le principe peut être décliné dans tous les domaines. Il dessine un changement radical de perspective sur l'assurance, celle-ci devenant la protection (indispensable, idéalement) qui accompagne des moments de vie.

Comme la banque, l'assurance est inexorablement vouée à évoluer d'un modèle fondamentalement focalisé sur la vente de produits vers la fusion de services dans les expériences de tous les jours. Tokio Marine montrait la voie dès 2014, pour quelques situations spécifiques. Depuis, la maturité a peu évolué dans les compagnies traditionnelles et AXA Italie est l'un des rares exemples récents de cette tendance. Il semble pourtant y avoir urgence : des startups sont prêtes à profiter de l'aubaine.

lundi 24 juillet 2017

Une app de paiement polyvalente chez OCBC

OCBC Pay Anyone
Si les applications mobiles de paiement se répandent au 4 coins du monde, elles peinent à s'imposer. À Singapour, OCBC Bank introduit de nouvelles capacités dans la sienne, afin qu'elle s'adapte à tous les usages et toutes les préférences. Loin d'être parfaite à ce stade, elle offre tout de même une polyvalence extrêmement prometteuse.

Au premier abord, Pay Anyone est semblable à toutes les solutions de sa catégorie. Sous la forme d'une application indépendante liée aux comptes bancaires de son utilisateur, elle permet à ce dernier d'émettre des paiements à destination de toute personne, cliente ou non de l'institution, en fournissant son adresse de messagerie, son numéro de téléphone ou son identifiant sur Facebook. Naturellement, pour recevoir son dû, le bénéficiaire doit par la suite indiquer les références du compte à créditer.

Tout récemment, OCBC a introduit une option qui facilite grandement les transferts entre adeptes du service (ils sont plus de 100 000 à ce jour), puisque l'application permet dorénavant de générer en quelques gestes un QR code représentant une demande de paiement. Il ne reste alors qu'à en transmettre l'image – par mail ou via un réseau social – ou encore, en cas d'interaction face à face, à la présenter sur son téléphone pour que le débiteur la capture et confirme le règlement, en toute sécurité, sur son propre appareil.

OCBC Pay Anyone

Parce que ce mode de fonctionnement est aussi parfaitement adapté à un usage en boutique et sur le web, OCBC l'adapte aux besoins des commerçants. Dans ce cadre, la banque s'appuie sur un réseau d'acceptation existant – NETS, comptant plusieurs milliers de points de vente dans l'île – reposant lui-même sur des paiements par QR codes, dont elle ne fait donc qu'intégrer la technologie au sein de son application. Les consommateurs bénéficient de la sorte d'une solution unique pour tous leurs échanges d'argent.

Outre la diversité des usages, la banque vise également à installer son service partout où ses utilisateurs sont susceptibles d'y avoir recours. Il est ainsi possible d'initier un paiement directement depuis la messagerie instantanée d'Apple (iMessage) ou en interpellant son assistant vocal (Siri). Certes, le processus manque aujourd'hui cruellement de convivialité (il s'agit d'un simple renvoi vers l'application mobile), mais la démarche laisse toutefois entrevoir des opportunités intéressantes pour l'avenir…

L'idée de développer un mode de paiement universel sur smartphone est la clé de l'approche d'OCBC. Elle constitue en effet un des seuls critères de différenciation concevables par rapport aux moyens conventionnels, tout en portant le potentiel de créer – par la récurrence d'utilisation qu'elle favorise – une habitude parmi ses utilisateurs, indispensable pour espérer engendrer une adoption massive. Sera-t-elle suffisante ?

dimanche 23 juillet 2017

Pour une Europe de la FinTech

Drapeau européen
Quand la Commission Européenne lançait, au printemps dernier, une consultation publique sur la FinTech, le moment ne pouvait être mieux choisi, entre accélération du phénomène et opportunités ouvertes par le Brexit. Parmi les 226 réponses reçues, celle de BBVA propose une approche transnationale qui paraît indispensable au secteur.

Statut oblige, le groupe espagnol ne manque pas, naturellement, d'insister sur l'importance d'établir des règles du jeu qui soient avant tout proportionnelles aux types d'activité exercées et aux risques associés et non à la dimension des entreprises. Sa position est déjà plus progressiste quand est abordé la question de fond : en dehors d'un effort de promotion de standards et d'interopérabilité, la réglementation devrait être agnostique des technologies mises en œuvre et embrasser l'expérimentation.

Mais, surtout, BBVA appelle de ses vœux une forte convergence européenne sur la FinTech, pilotée par les instances de l'Union, tout en impliquant largement les instances nationales (de la finance et de la technologie). Dans une sorte de prolongement des mécanismes de passeport existants pour les licences bancaires, cette idée se traduirait notamment par la création d'un cadre commun pour tous les domaines du secteur : finance participative, investissement automatisé, plates-formes de services…

Toujours sans vouloir empiéter sur les prérogatives des pays membres, BBVA exprime plus particulièrement son soutien à l'uniformisation des bacs à sable réglementaires sur le continent. L'objectif affiché est d'éliminer les divergences européennes sur le sujet, afin de promouvoir le développement d'une FinTech sans frontières. Il faut probablement aussi y voir une certaine inquiétude vis-à-vis des initiatives du Royaume-Uni et de la Suisse en la matière, dont la concurrence doit impérativement être contrée.

L'enjeu est extrêmement important, à plus d'un titre. En effet, il ne s'agit pas uniquement pour l'Europe d'attirer et retenir les entrepreneurs sur son territoire, face à des régulateurs (aujourd'hui) plus compréhensifs. Il est aussi question de donner aux startups les moyens de s'épanouir dans un marché suffisamment large pour que leurs modèles économiques soient viables – ce qui semble impossible à l'échelle d'un pays (même la France ou l'Allemagne), pour la plupart d'entre elles – et, par la même, résister à la domination de plus en plus flagrante des acteurs américains et, dans quelques temps, chinois…

Proposition de BBVA pour la FinTech européenne

samedi 22 juillet 2017

Wells Fargo prépare une tour de contrôle des finances personnelles

Wells Fargo
Dans le monde d'aujourd'hui, nous semons nos données bancaires un peu partout, entre autorisations de prélèvement pour des services récurrents et enregistrement de nos cartes pour accélérer les paiements sur nos sites préférés. Afin d'aider ses clients à reprendre le pouvoir, Wells Fargo leur proposera bientôt une « tour de contrôle ».

Déployé d'abord en mode expérimental, dans les prochaines semaines, auprès d'un échantillon de collaborateurs de la banque, le dispositif – réellement baptisé « Control Tower » – devrait être généralisé au début de 2018. Il permettra alors aux clients de surveiller depuis un tableau de bord unique, accessible via web et mobile, tous les tiers ayant accès à leurs comptes courants ou cartes de paiement : services publics, abonnements divers et variés, sites de commerce en ligne, porte-monnaie virtuels…

Il n'est pas simplement question de retrouver où sont dispersées les précieuses informations, la tour de contrôle de Wells Fargo donne également à ses clients la possibilité d'agir. Ainsi, chacune des utilisations identifiées peut être activée ou désactivée instantanément. Le service autorise en outre les modifications, individuelles ou groupées : en cas de renouvellement de carte, par exemple, tous les mandats existants seront mis à jour d'un seul geste. Il semble même prévu une option de changement d'adresse, sur le même principe, qui devrait faciliter les déménagements.

Tour de contrôle Wells Fargo

Dans un registre différent, la tour de contrôle est aussi destinée à piloter les accès aux outils de la banque. Chaque appareil enregistré (PC, tablette, smartphone…) se voit donc attribuer un certain nombre d'habilitations (pour la consultation des comptes, l'exécution d'opérations, la réception de notifications…), qui peuvent être affectées ou révoquées à tout moment. La plate-forme se positionne de la sorte comme un puissant instrument de protection et de sécurisation des informations sensibles.

La démarche de Wells Fargo s'inscrit parfaitement dans l'air du temps, entre demande de transparence des consommateurs et inquiétude croissante vis-à-vis de l'exploitation des données personnelles, sur fond d'exigences réglementaires (sans revenir sur le besoin de redorer l'image de l'institution après le scandale qui l'a secouée en 2016).

Or le contexte actuel laisse entrevoir une opportunité pour les établissements français de s'inspirer de cette initiative. Après tout, une partie des mécanismes sous-jacents à la tour de contrôle sont déjà mis en œuvre pour remplir leurs obligations de mobilité bancaire (inscrites dans la loi Macron). Dans ces conditions, pourquoi ne pas profiter de cette contrainte pour développer un service à valeur ajoutée, dont l'impact potentiel sur la fidélité des clients est susceptible de contrebalancer les effets attendus du texte ?

vendredi 21 juillet 2017

Comment attirer les talents dans la banque ?

Goldman Sachs
Bien que les institutions financières aient encore du mal à l'admettre, elles ont désormais de plus en plus de difficultés à recruter les talents technologiques dont elles auraient pourtant bien besoin pour porter leur mutation « digitale ». Face aux sirènes des géants du web et des startups, elles en viennent à des mesures un peu désespérées…

Les offres d'emploi des banques et compagnies d'assurance dans le domaine informatique prennent aujourd'hui des allures étranges. Sous prétexte d'instaurer un « esprit startup », on vous y promet baby-foot et table de ping-pong pour vous détendre, des canapés dans les espaces de travail, une salle de sport, des bonbons en libre service (j'attends de voir la restauration gratuite)… Jusqu'à Goldman Sachs qui officialisait récemment, dans une note interne, le relâchement de son code vestimentaire.

Sérieusement ? Si ce sont les seuls arguments qu'ont à offrir les grands groupes de la finance pour convaincre les spécialistes informatiques et les jeunes diplômés de les rejoindre, il est à craindre que leur problème n'aille qu'en s'aggravant. C'est à la fois faire injure aux candidats potentiels et méconnaître profondément l'état de la « concurrence » que d'user de telles (grossières) ficelles. En effet, ce ne sont (évidemment) pas ces quelques gadgets issus du folklore de l'entrepreneuriat qui feront la différence.

À peine plus sérieuses, les prétentions de travail en mode agile ne trompent plus grand monde quand il ne s'agit que de faire un point d'équipe tous les matins devant un tableau de post-its. Et que dire des « data scientists » qui se morfondent à manipuler quelques données dans une feuille Excel ou des experts de la blockchain qui enchaînent les « PoC » (« Proof of Concept ») sur des cas d'usage sans queue ni tête, sans le moindre espoir de déploiement en production ? Or, dans notre monde connecté, il n'est plus possible de dissimuler ces réalités, qui effraient les meilleurs candidats.

A contrario, la promesse la plus importante des entreprises « désirables » est de proposer de vrais challenges à leurs collaborateurs, dans un environnement où ce qu'ils produisent a du sens, par exemple sur la vie d'un client. Plus qu'une démarche agile, ce qui compte est de se trouver dans une équipe resserrée, avec une autonomie et un pouvoir de décision qui rendent concrètes les décisions et les actions du quotidien. Et, si nécessaire, la direction générale est toujours accessible, sans intermédiaire inutile.

Voilà donc ce qu'il faudra mettre en place pour espérer attirer à nouveau un jour les profils les plus brillants dans les DSI des institutions financières. Naturellement, une telle vision requiert des transformations profondes, dans l'organisation et dans la culture interne, beaucoup moins triviales que les opérations cosmétiques dont elles se contentent actuellement. Mais il faudra s'y faire : le phénomène de la révolution « digitale » affecte aussi les métiers de l'informatique, peut-être même plus que les autres…

Banquier…

jeudi 20 juillet 2017

Un assistant virtuel plein d'initiative

ING
Recevoir un message lors d'un mouvement important sur son compte ou quand un nouveau relevé d'opérations devient disponible est désormais habituel. En Turquie, ING s'empare de ces fonctions triviales – qui restent appréciées par les clients – et les fait évoluer, jusqu'à créer un assistant virtuel fidèle, attentif et prêt à prendre des initiatives.

Cette nouvelle application n'est pas tout à fait comme les autres, puisque, en dehors d'une étape de configuration initiale, elle n'est jamais sollicitée par l'utilisateur. Son rôle est, au contraire, de réagir spontanément à toutes sortes d'événements et prendre les décisions qui s'imposent, qu'il s'agisse d'émettre une alerte… ou d'initier une transaction. Exemple classique mais néanmoins rarement mis en œuvre, l'autorisation de ponctionner automatiquement l'épargne dès que le compte courant menace d'être à découvert.

Un peu plus élaboré et, a priori, inédit, un des agents intégrés permet également de programmer des paiements récurrents (tel qu'un loyer), non à date fixe, mais après que le salaire ait été perçu. Enfin, il n'est pas question uniquement d'argent. Bien que la banque soit avare de détails sur son fonctionnement, un autre scénario éveille plus particulièrement la curiosité : l'« Assistant Orange » pourrait réaliser automatiquement un versement à un fleuriste à l'approche d'un anniversaire important…

Ce que dessine ainsi ING ne serait donc plus un outil bancaire. Dans une perspective inversée, nous aurions plutôt affaire à un assistant personnel de la vie quotidienne auquel son « maître » à donné accès à ses comptes bancaires, pour plus de confort.

ING Orange Assistant

La première version de l'« Assistant Orange » comporte 23 types de règles, dont seulement 6 sont liées à des actions « intelligentes » (les autres étant de l'ordre de la définition de préférences et des notifications). Mais ING a déjà prévu les extensions futures, imaginant de déployer 69 options supplémentaires, dont on peut rêver qu'une bonne partie traitera justement d'événements de la vie courante. Il reste cependant à espérer que leur paramétrage ne se transformera pas en cauchemar pour les clients…

Un peu plus de deux mois après son lancement, le système a conquis environ 18 000 adeptes, qui ont créé presque 2 millions de règles différentes. Même si les plus populaires d'entre elles sont les plus basiques (principalement les notifications de mouvements), la banque est suffisamment satisfaite de ces résultats préliminaires pour envisager une déclinaison du concept dans d'autres pays où elle est présente (ce qui nous donnera l'occasion de vérifier si l'exécution est à la hauteur de la promesse).

Petit à petit, les assistants virtuels se font une place dans les services financiers, sous diverses formes. Société Générale a choisi d'intégrer ses services dans un chatbot tiers (Jam). AXA annonçait récemment une collaboration avec Wiidii pour développer sa solution. ING crée son propre service… en préférant une approche par règles logiques (dans le style d'un IFTTT) plutôt que l'intelligence artificielle plus ou moins puissante des autres… Leur point commun est, en tous cas, de vouloir inscrire (et faire disparaître) la banque et l'assurance dans les moments de vie des clients…

mercredi 19 juillet 2017

Pourquoi l'agence n'est pas une boutique

Amazon
Tandis qu'Amazon annonçait récemment l'acquisition de Whole Foods, les tenants des réseaux d'agences ont à nouveau fait entendre leur voix : si les géants du web ressentent le besoin d'investir dans le commerce « en dur », n'est-ce pas le signe que les banques ont tort de réduire leur présence physique ? Le raisonnement est hélas simpliste…

Pour une fois, je ne m'attarderai pas sur la valeur intrinsèque de l'agence ou sur l'importance de la relation humaine (qui d'ailleurs devrait en être beaucoup plus décorrélée qu'elle ne l'est généralement) pour la banque de demain. Le point qui m'intéresse ici est de démontrer pourquoi l'analogie avec le commerce de détail – à laquelle ont fréquemment recours ceux qui veulent justifier le maintien des points de vente – est artificielle et en quoi elle risque d'inspirer des stratégies insidieusement stériles.

Ainsi, comparer une boutique avec une agence bancaire revient à oublier une différence essentielle entre ces types de lieux et, surtout, entre les motivations qui incitent les clients à pousser la porte de l'une ou de l'autre. En synthèse, d'un côté, l'objet de la visite est tangible et désirable (certes à des degrés variables). De l'autre, il n'est plus même question d'objet et les mots associés en priorité à l'expérience sont plutôt « service », « conseil » (idéalement), « ré-assurance », « obligation »…

En effet, quels que soient les bénéfices de la vente à distance, l'achat en magasin possède encore, et pour longtemps, un avantage exclusif et déterminant : la possibilité immédiate de voir, toucher et même, dans certains cas, essayer le produit convoité. Il s'agit là d'un besoin universel – concernant tous les secteurs de la distribution, de l'alimentation (qui nous ramène à Whole Foods) au bricolage, en passant par le luxe, par exemple – que les plates-formes web doivent contourner pour réussir.

Dans cette logique, l'objectif d'une boutique est simple : faire en sorte que le visiteur regarde, manipule et essaye les produits exposés, de manière à susciter une envie d'achat. Là aussi, même si les émotions ne sont pas égales face à une tomate et une paire de chaussures et que tous les marchands ne le maîtrisent pas intimement, le mécanisme mis en jeu est toujours identique. L'archétype de ce modèle est l'Apple Store, dont la mission n'est point de vendre mais de rendre désirables les objets exposés.

Apple Store Opéra (Paris)

Qu'en est-il dans la banque ? Une première particularité de l'agence est qu'elle est historiquement consacrée, en priorité, à l'exécution d'opérations (dépôts, retraits, virements…). Bien sûr, les responsables cherchent par tous les moyens à la transformer en point de vente, notamment en installant des automates pour remplir ces fonctions, mais l'habitude est fortement ancrée dans la population et elle continue à marquer l'« ambiance » (cf. les rangées de tablettes parfois mises à disposition des visiteurs).

Si la transition vers un modèle de vente se concrétise, il subsistera un autre obstacle à franchir. Ce que la banque propose à son client est non seulement intangible mais, de surcroît, complexe (au moins dans la présentation qui en est couramment faite). Il est rigoureusement impossible de faire voir, toucher et tester quoi que ce soit, puisque le produit commercialisé est virtuel ! Ce qui emportera la décision d'achat, ce n'est pas un rapport « sensuel » avec un objet, mais uniquement la qualité du conseil.

J'adresse donc un message à tous les banquiers. Peut-être avez vous raison de maintenir votre confiance en la valeur de votre réseau d'agences. Mais, par pitié, n'allez pas croire que vous l'adapterez aux besoins des consommateurs en adoptant les standards du commerce de détail. Si vous copiez l'Apple Store, vous ferez la promotion des produits d'Apple mais vous ne vendrez rien ! Vous devez trouver les clés spécifiques de votre transformation, en partant de vos objectifs et des attentes réelles de vos clients.

mardi 18 juillet 2017

Le bitcoin entre dans une banque suisse

Falcon Private Bank
Pendant que la plupart de ses concurrentes dans le monde s'épuisent à chercher des cas d'utilisation sensés pour la technologie blockchain, une petite banque privée suisse – Falcon Private Bank – préfère explorer [PDF] l'opportunité d'introduire le bitcoin dans la panoplie d'actifs qu'elle se propose de gérer pour le compte de ses clients fortunés.

Reconnaissant le potentiel de la crypto-monnaie comme support d'investissement, sans toutefois ignorer les risques qu'elle comporte, l'institution s'est associée avec la plate-forme spécialisée Bitcoin Suisse AG pour bâtir une offre unique en son genre, récemment approuvée par le régulateur local, la FINMA. Ses clients peuvent ainsi, dorénavant, acquérir, conserver et céder des bitcoins par le truchement de leur banquier (les transferts sont pour l'instant impossibles, dans l'attente de clarification réglementaire).

L'idée qu'une institution traditionnelle prenne position sur un marché dont un des avantages est d'éliminer le besoin de tiers de confiance peut paraître contre-intuitive. Cependant, la solution ne s'adresse pas à n'importe qui et les clients de Falcon qui s'intéresseront au bitcoin ne partagent probablement pas les valeurs libertaires de certains de ses aficionados. Eux apprécieront le surcroît (réel ou apparent) de sécurité que leur garantit le recours à un intermédiaire ayant pignon sur rue (et supervisé).

La banque a d'ailleurs quelques arguments sérieux à faire valoir. Outre son côté rassurant, elle possède le statut officiel indispensable pour exécuter les opérations de certains investisseurs institutionnels, qui auront de la sorte, pour la première fois, accès au bitcoin. Elle met également en avant les protections et assurances qui couvrent tous les actifs qu'elle gère, ainsi que les mécanismes de sécurité (fournis, techniquement, par Bitcoin Suisse AG) entourant le stockage des avoirs numériques de ses clients.

Accueil Falcon Private Bank

Il n'est pas certain que cette initiative fasse une grande différence dans la vie (actuellement agitée) du bitcoin, si ce n'est qu'elle assoit un peu plus sa respectabilité en dehors des cercles d'initiés et qu'elle reçoit une nouvelle marque de reconnaissance de la part d'un régulateur. En particulier, une publicité supplémentaire auprès d'investisseurs n'est peut-être pas ce dont a le plus besoin la crypto-monnaie aujourd'hui, alors que sa volatilité atteint des sommets, par rapport une utilisation à fins de commerce.

En revanche, la portée de l'événement devrait, théoriquement, se faire sentir dans le milieu bancaire. Il serait en effet temps que celui-ci s'éveille à une révolution qu'il continue à considérer avec méfiance (le mythe de la devise du crime organisé a la vie dure…) et à laquelle il préfère le mirage de la technologie sous-jacente (la blockchain). Sans excès, Falcon a au moins le mérite d'accepter l'existence du bitcoin et, partant, de rechercher les possibilités qu'il lui offre de développer un nouveau domaine d'activité.

lundi 17 juillet 2017

L'avenir des développeurs informatiques

Logiciel
Le web est inondé de prédictions apocalyptiques à propos des métiers qui seront bientôt pris en charge par une forme ou une autre d'intelligence artificielle. Mais, jusqu'à cette liste établie par la revue InformationWeek, le développement informatique était passé sous les radars. Il a pourtant de bonnes raisons d'être automatisé, ce qui aura de nombreuses conséquences insoupçonnées.

Fondée sur une approche purement logique, l'écriture de code serait depuis longtemps confiée à des agents virtuels s'il était possible de faire comprendre à ces derniers les fonctions à programmer, facilement et de manière fiable. Or, inéluctablement, le moment où ce rêve sera devenu réalité approche. La meilleure raison d'y croire maintenant est la pénurie croissante de professionnels (humains) dans un univers où le moindre objet ou service est motorisé par un logiciel plus ou moins élaboré.

En effet, le marché est actuellement si déséquilibré que la création de solutions automatiques s'en trouve fortement stimulée. Dans un premier temps, les outils de type « low code » apportent une réponse partielle, en facilitant l'assemblage d'applications avec un minimum de programmation. Mais, les progrès sont rapides et, déjà, l'université de Cambridge expérimente [PDF] une approche d'apprentissage automatique pour une génération de code informatique entièrement autonome.

Il est peut-être prématuré de parler de la disparition prochaine des métiers du développement logiciel (encore ne faut-il pas ignorer la possibilité d'une accélération du phénomène), mais il est certain qu'il s'agit désormais d'une hypothèse à prendre en compte. Examinons de près quelques impacts prévisibles, susceptibles de remettre en question des certitudes aujourd'hui bien ancrées dans les mentalités.

Tout d'abord, il serait important de s'interroger sur l'intérêt stratégique d'apprendre à coder. Le mouvement, qui tend à prendre de l'ampleur, concerne autant les adultes que les enfants, auxquels on promet – entre besoin supposé d'appréhender le monde « digital » et opportunités illimitées d'emploi – une carrière brillante s'ils savent écrire une application et un avenir noir dans le cas contraire. J'ai déjà eu l'occasion de prendre position sur ce sujet mais il me semble nécessaire de tuer à nouveau le mythe.

Il est parfaitement admissible que, dans la période de transition que nous vivons, posséder des notions de programmation est utile pour comprendre comment notre environnement numérique se façonne et fonctionne. Mais, demain, il sera superflu d'être développeur pour créer (et encore moins pour utiliser) des logiciels, de la même manière qu'il est devenu totalement accessoire de connaître les détails de l'architecture d'un ordinateur, ce qui paraissait – et, dans un sens, était – indispensable il y a 30 ans.

Un autre aspect, potentiellement terrifiant, de l'arrivée de l'intelligence artificielle dans la production de code serait la capacité de prolonger la vie du patrimoine antédiluvien de certaines institutions financières, alors que les personnes maîtrisant les systèmes et les langages sous-jacents se font plus rares. Le danger est, bien entendu, de profiter de l'aubaine pour éviter de lancer des chantiers de modernisation primordiaux. Le scénario idéal serait plutôt une utilisation en assistance à la transition.

Enfin, le fond du problème est que le logiciel devient progressivement trop complexe (et trop critique) pour être confié à des humains : à terme, seule l'intelligence artificielle sera en mesure d'en assurer la production, avec l'efficacité et la sécurité requises. Quand on parle de la généralisation de l'informatique quantique dans une dizaine d'années, les difficultés seront décuplées et il n'y aura probablement plus le choix…

Développeur

dimanche 16 juillet 2017

Sécurité centrée client à Société Générale

Société Générale
Il est des idées qui semblent couler de source et qui, pourtant, mettent des années à mûrir. Ainsi, la gestion des mots de passe par leurs clients est un sujet sur lequel les banques maintiennent une dangereuse ambiguïté. Initiative rare, le partenariat entre Société Générale et Dashlane offre (enfin !) un début de réponse rationnelle.

Le cœur du problème est connu depuis longtemps et ne fait que s'aggraver avec le temps. En raison de la généralisation des services sur le web et sur smartphone, chacun d'entre nous possède désormais des dizaines, voire des centaines de comptes en ligne, dont l'accès est protégé par un mot de passe, dans la plupart des cas. Naturellement, les recommandations d'utiliser des codes complexes et différents sur chaque site, ou encore de ne pas les noter, ne pèsent pas lourd face à notre besoin permanent de connexion.

Les conséquences de cette situation peuvent être dramatiques, alors que les détournements de comptes utilisateur se multiplient (plus de 2,3 milliards en 2016). Or les banques ont une part de responsabilité dans la dérive, d'abord parce qu'elles font partie des entreprises dont l'accès aux services en ligne, particulièrement sensible, est contrôlé par un mot de passe (même l'utilisation de la biométrie sur les applications mobiles s'accompagne d'une option de repli via une méthode traditionnelle).

Surtout, elles connaissent parfaitement les mauvaises pratiques de leurs clients – par exemple, si elles imposent des codes trop complexes, à renouveler trop fréquemment, elles savent qu'ils seront inscrits dans leur téléphone – mais, en dehors de conseils génériques, elles ne se préoccupent pas de leur proposer une vraie solution. Alors, quand Société Générale se met à suggérer à ses clients d'adopter le gestionnaire de mots de passe Dashlane (comme le fit Soon en son temps), l'hypocrisie s'estompe un peu…

Offre Dashlane de Société Générale

Il est vrai que la démarche reste extrêmement modeste. Outre la promotion du service, le seul bénéfice offert aux clients est une réduction de 25% sur la première année d'abonnement. A minima, il serait utile d'expliquer aux visiteurs les enjeux de ce type de logiciel, en insistant notamment sur leur qualité éminemment variable, qui permettrait de justifier la mise en avant d'un produit spécifique tel que Dashlane. Et, bien entendu, il serait beaucoup plus convaincant de mettre l'outil à disposition gratuitement (comme la banque le fait d'ailleurs pour le produit Trusteer de protection de la navigation).

Dans une certaine mesure, les institutions financières agissent en matière de cybersécurité comme dans toutes leurs activités : elles mettent en place les moyens nécessaires pour se couvrir elles-mêmes mais à aucun moment elles ne prennent le point de vue du client, avec son contexte, son environnement et ses (petits) défauts. La croissance exponentielle des risques ne pourra supporter longtemps une telle attitude. Société Générale a donc au moins le mérite de faire un pas dans la bonne direction…

samedi 15 juillet 2017

Stop aux mythes sur les données personnelles

CNIL
Dans la plupart des entreprises – notamment les institutions financières – j'entends régulièrement cette plainte : « nous aimerions bien exploiter les données de nos clients, mais la CNIL nous l'interdit ». Si cela ne suffit pas à clore toute discussion, le Règlement Général de Protection des Données (RGPD) sert maintenant d'argument imparable.

La réalité est pourtant très différente. Les différents textes en vigueur ou à venir n'ont certainement pas vocation, à quelques rares exceptions près, à prohiber les usages de données personnelles. Au contraire, leur principal objectif consiste justement à définir un cadre acceptable pour ce faire. Parce qu'il est généralement impossible de faire entendre raison à des interlocuteurs inflexibles, la prise de position d'une représentante de la CNIL dans une interview pour CBanque représente un contre-feu utile.

Clémence Scottez l'affirme sans ambiguïté : « il circule beaucoup de fantasmes sur l'exploitation commerciale des données bancaires ». Loin d'empêcher ces pratiques, la loi impose uniquement qu'elles ne soient pas mises en œuvre à l'insu des clients et que le recueil de leur consentement respecte quelques règles relevant de la plus élémentaire déontologie. Quant au RGPD, il n'est pas plus restrictif a priori, puisqu'il vise essentiellement à renforcer la transparence des usages au profit du consommateur.

Au lieu de se focaliser (voire se bloquer) sur des contraintes réglementaires fictives (tout en respectant les obligations qui leur incombent, naturellement), les entreprises désireuses d'explorer les opportunités offertes par les données qu'elles hébergent devraient d'abord se pencher sur les moyens de convaincre leurs clients qu'elles vont ainsi leur apporter un meilleur service. En effet, le risque de rejet est plus élevé qu'une infraction et ses conséquences (sur l'image, par exemple) aussi dommageables.

Il s'agit là d'un enjeu de compétitivité. Les règles de protection des données personnelles s'appliquent de manière identique à tous les acteurs, grands groupes et startups, sans discrimination. Mais seuls ceux qui prennent le soin d'évaluer précisément ce qu'ils peuvent faire ou pas avec l'information captée pourront capitaliser sur sa valeur, pour améliorer leur efficacité opérationnelle, affiner et rendre plus attractives leurs offres, renforcer la fidélité de leur clientèle, créer de nouveaux modèles économiques…

Données personnelles : vous avez des droits !

vendredi 14 juillet 2017

L'intelligence artificielle en manque de talents

IBM Watson
Quand un analyste financier – James Kisner (Jefferies) – se penche [PDF] sur les perspectives d'avenir d'IBM et de sa technologie d'informatique cognitive Watson, ses conclusions sont pour le moins pessimistes. Plus largement, ses observations peuvent aussi résonner dans les grands groupes qui s'intéressent à l'intelligence artificielle.

Depuis la victoire de son super-ordinateur au jeu télévisé Jeopardy en 2011, IBM a misé toute sa fortune future sur l'intelligence artificielle en général et sur Watson en particulier. Les annonces se multiplient à un rythme effréné, quitte à, parfois, rhabiller d'anciennes solutions sous de nouvelles couleurs, et chaque client supplémentaire conquis fait la une de la presse (pour ne citer que deux exemples dans le secteur financier français : Crédit Mutuel [PDF] et Orange Bank). Mais quelle est la réalité derrière le marketing ?

Les retours d'expérience commencent à s'accumuler et pointent vers une faiblesse manifeste (et pressentie depuis longtemps) de l'approche d'IBM : ses outils ont beau être les plus complets et les plus riches de l'univers de l'informatique cognitive – ce que reconnaît le rapport de James Kisner –, plus encore que les plates-formes concurrentes, ils ne produisent de résultats et ne délivrent de valeur que s'ils sont mis en œuvre par des experts, capables de capturer et préparer les données qui les alimentent.

Or Big Blue semble connaître des difficultés avec cette exigence d'accompagnement des clients dans le déploiement de Watson. Et, dans un contexte de concurrence exacerbée, à la fois avec les autres géants technologiques et avec une multitude de startups spécialisées (qui attirent des investissements importants), la conjoncture ne lui est pas favorable. Un cas représentatif cité dans le dossier est celui d'un groupe de santé, MD Anderson, dont le projet a été stoppé après plus de 60 millions de dollars dépensés.

Pour les entreprises qui ne jurent que par les technologies d'IBM, l'alerte doit être prise au sérieux. Il serait temps d'introduire un peu de sens critique face à ses promesses mirobolantes à propos de Watson et de l'intelligence artificielle. En pratique, au-delà d'une multitude d'expérimentations plus ou moins avancées, ses rares applications opérationnelles restent peu ambitieuses, malgré des coûts souvent prohibitifs, tandis que des solutions alternatives convaincantes se développent rapidement.

Mais la leçon ne s'arrête pas là. En effet, les insuffisances identifiées soulignent également un problème majeur, qui frappe toutes les organisations désireuses d'explorer les opportunités de l'intelligence artificielle : la pénurie de talents. Quand James Kisner estime, à travers une analyse des offres d'emploi, qu'un acteur tel qu'Amazon cherche à recruter dix fois plus de spécialistes qu'IBM, il met en évidence l'extraordinaire déséquilibre du marché, entre l'offre et la demande, et entre employeurs.

Le choc est rude pour les velléités de domination de Watson, il le sera encore plus pour les institutions financières qui commencent à percevoir l'inévitable direction que prennent leurs métiers. Elles découvriront bientôt que les experts dont elles ont besoin pour accroître leur productivité et mieux satisfaire leurs clients grâce aux technologies d'analyse et de traitement de l'information sont non seulement très prisés sur le marché mais que, de plus, ils sont plus attirés par les géants du web ou les startups

IBM Watson

jeudi 13 juillet 2017

La science derrière le comportement financier

UBank
Les statistiques sont connues et universelles : une fraction importante de la population n'épargne pas ou très peu et se trouve ainsi à la merci d'un accident de la vie. L'australienne UBank a commandité une étude scientifique approfondie afin de mieux comprendre les mécanismes psychologiques susceptibles d'influer sur ces comportements.

Dans son pays, la filiale de NAB estime, par exemple, que deux millions de personnes disposent de moins de 1 000 dollars de réserve. Et signalons immédiatement à ceux qui ne s'intéressent pas à l'autre bout du monde que, selon une enquête conduite (entre autres) par ING, 30% des européens n'ont pas d'argent de côté et la proportion évolue peu avec la reprise économique. Si les français semblent un peu plus prévoyants que la moyenne, près d'un sur quatre (23%) est, malgré tout, dans cette situation.

En creusant la question, les chercheurs découvrent rapidement que, sans surprise, les consommateurs succombent facilement à la tentation d'un achat leur procurant un plaisir immédiat, au lieu de penser à leur avenir en épargnant. En conséquence, même ceux qui font la démarche de se constituer une réserve finissent fréquemment par puiser dans celle-ci pour satisfaire un besoin plus ou moins impulsif (cette seule mauvaise habitude représenterait 32 milliards de dollars de dépenses par an en Australie).

Pour aller encore plus loin dans l'analyse, un échantillon de 50 personnes a ensuite été soumis à une expérimentation inédite, destinée à valider une hypothèse – à savoir la déconnexion vis-à-vis de son « futur soi » – quant à la réticence instinctive de l'individu à épargner et, potentiellement, identifier des solutions. Pour ce faire, les réactions des cobayes à une série de scénarios financiers, dans lesquels ils reçoivent ou donnent de l'argent, ont été mesurées (par électroencéphalographie) et comparées.

Australia is a nation of spenders

Les résultats sont édifiants, tant les comportements évoluent entre la situation initiale, dans laquelle les participants n'ont subi aucune préparation préalable, et une deuxième phase avant laquelle ils ont d'abord été confrontés avec une simulation de leur apparence physique dans 10 à 20 ans. Non seulement leurs réponses ont-elles basculé de la dépense immédiate vers une préférence pour l'épargne chez 72% d'entre eux mais, de plus, leur attention a crû de 150% au moment de faire leur choix.

La conclusion à tirer de cette étude est qu'il est donc possible de changer les comportements des consommateurs, vers une plus grande responsabilité en matière de finances personnelles, en les mettant en « contact » avec leur avenir. Pour concrétiser cet enseignement et à défaut de vieillir des photos de ses clients, UBank développe actuellement des capacités prédictives dans son application mobile, qui permettront à ses utilisateurs de « voir » leurs dépenses (récurrentes) futures en incluant celles qui sont relativement peu fréquentes (telles qu'une prime d'assurance annuelle).

Quelques concepteurs de solutions de PFM (parmi les plus avancées) ont depuis longtemps eu l'intuition que la seule manière efficace d'influer sur les habitudes de dépenses étaient de projeter leurs utilisateurs quelques semaines, mois ou années en avant. La démonstration scientifique achèvera-t-elle de convaincre les banques de s'engager dans cette voie ou continueront-elles de craindre d'effrayer leurs clients avec des prévisions parfois pessimistes et toujours approximatives ?

mercredi 12 juillet 2017

Satisfaction client ≠ simplicité d'usage

Forrester
À force de répéter que l'expérience utilisateur doit faciliter les interactions des clients avec leur banque, on finirait par croire que cette simplification est le but ultime à atteindre. Dans un court billet, Maxie Schmidt-Subramanian (Forrester) nous rappelle opportunément que ce n'est pas le cas et que d'autres critères doivent être pris en compte.

L'expérience client est aujourd'hui devenue, à juste titre, un pivot de la différenciation concurrentielle pour les entreprises de tous secteurs. Et, dans nombre de cas, les premiers efforts en la matière portent sur l'identification et la suppression des points de friction dans les parcours d'achat, de support ou autres, de manière à les rendre toujours plus fluides. Dans le secteur financier, le raisonnement est même parfois poussé (notamment dans ces colonnes) jusqu'à l'invisibilité totale.

Cependant, selon les recherches menées par Forrester, la mise en place de services rapides et intuitifs ne suffit pas nécessairement à « enchanter » l'utilisateur dans la durée, même si sa réaction immédiate est positive. Pour atteindre le niveau de séduction (et de fidélité) désiré, il faut dépasser cette satisfaction « primaire » et donner du sens à l'interaction, avec une résonance émotionnelle, via, par exemple, la compréhension (démontrée) et la prise en compte des attentes profondes de l'individu.

Or le meilleur moyen de donner au client la sensation d'être vraiment considéré et estimé, et d'acquérir ainsi sa loyauté, reste, sans ambiguïté, l'échange avec une autre personne. Ainsi, les relations humaines ont, dans l'échelle de l'expérience utilisateur, une valeur bien plus importante qu'un service en ligne facile à manipuler. Voilà qui, de prime abord, apportera de l'eau au moulin des inconditionnels de l'agence et du conseiller bancaires (face à ma conviction intime de leur inéluctable disparition, à terme).

Il faut tout de même relativiser le propos. Outre l'exigence d'empathie dont doit faire preuve son interlocuteur pour combler le client (et qui est loin d'être la norme dans les institutions financières), les processus sont aujourd'hui tellement peu conviviaux et sources de tant de frustrations que leur simplification (qui est aussi celle de l'expérience utilisateur) est une priorité absolue, quel que soit le canal de la relation.

Par la suite, il conviendra encore de s'interroger sur la réelle capacité à « enchanter » quelqu'un dans le cadre de son interaction avec la banque. Parce que l'habitude en est ancrée dans notre culture, il subsiste probablement une certaine marge de manœuvre dans ce domaine. Mais, à terme, il deviendra de plus en plus évident que la véritable satisfaction réside dans l'acte que le service financier à rendu possible et non dans celui-ci : dans cette perspective, la tendance vers l'invisibilité reste donc d'actualité…

Furieuse…

mardi 11 juillet 2017

Pourquoi changer ce qui fonctionne ?

ANZ
Tandis que l'un de ses 5 (!) cœurs bancaires informatiques vient de fêter son quarantième anniversaire, le DSI de la banque australienne ANZ affirme que, les systèmes existants fonctionnant parfaitement, il ne voit pas la nécessité de se lancer dans un coûteux chantier de modernisation. Une vision partagée par nombre de ses confrères…

Il est vrai que le raisonnement est a priori imparable : il est difficile de justifier un investissement – qui se mesurerait en milliards de dollars, sans parler des risques qu'induirait un renouvellement – tant que la plate-forme actuelle peut être maintenue en conditions opérationnelles et qu'elle ne handicape pas la capacité de la banque à mener sa transformation « digitale ». Que les principales concurrentes d'ANZ, CommBank et NAB, l'aient fait et en tirent des bénéfices visibles ne constitue par un argument suffisant.

Cette position résiste toutefois assez mal à une analyse objective. Ainsi, comme le souligne Chris Skinner, la pérennité des logiciels en cause est hautement discutable. Si, aujourd'hui, les fournisseurs de ces composants sont ravis d'en assurer le support, ils jouissent de la sorte d'un pouvoir absolu sur leurs clients, notamment sur le prix de leurs services, et, surtout, ils n'en sont pas moins soumis aux effets de l'obsolescence des technologies sous-jacentes, dont la pénurie de compétences.

Mais ce n'est pas la seule raison pour laquelle l'approche d'ANZ (et des autres banques qui suivent une voie similaire) pourrait s'avérer extrêmement dangereuse pour sa survie. Pour le comprendre, il faut aussi prendre en compte quelques paramètres supplémentaires, tels que le nombre d'applications et logiciels divers déployés (2 500 !), dont une bonne partie est redondante, ou le commentaire du COO selon lequel les systèmes cœurs devront tout de même, un jour (plus tard…), être remplacés.

Les dirigeants ne sont donc pas totalement aveugles face à la situation et ils sont conscients que, à terme, l'entreprise devra franchir le pas. Dès lors, leurs justifications résonnent plus comme des excuses et peut-être le problème de fond est-il simplement un manque de courage associé à l'espoir qu'un autre (futur) responsable assumera la charge à leur place. Malheureusement, cette stratégie a bien peu de chances de réussir, en particulier parce que le niveau de risque ne fait que croître exponentiellement.

En effet, ce qui rend difficile (et prohibitif) une rénovation des cœurs bancaires n'est pas tant la mise en place d'un nouveau système que son intégration dans l'environnement existant. Par essence, (presque) toutes les applications de la banque en dépendent, les 2 500 déjà recensées auxquelles viennent s'ajouter régulièrement celles qu'exige la révolution « digitale ». La pression grandissante qu'elles exercent sur des plates-formes qui n'ont pas été conçues pour une telle charge amène à la multiplication de moyens palliatifs, qui fragilisent l'ensemble, aussi modulaire paraisse-t-il au premier abord.

Que le remplacement du cœur de système ne soit pas une entreprise à prendre à la légère est une évidence. En revanche, que les banques qui ne l'ont pas déjà fait ne s'y préparent pas activement, maintenant, est une faute. La première étape (hélas rarement menée avec la rigueur nécessaire) consiste à effectuer un recensement exhaustif de l'existant et de ses interdépendances. Viendra ensuite une phase indispensable de rationalisation : inutile d'embarquer un excédent de bagages dans la transformation.

Alors, seulement, sera-t-il temps d'organiser le renouvellement. Naturellement, pendant ce temps, la vie ne s'arrête pas et les nouvelles applications devront être intégrées en permanence dans le plan (et conduire, potentiellement, à des décommissionnements supplémentaires). En prenant du recul, on perçoit mieux l'ampleur de la tâche, ainsi que sa tendance inéluctable à se complexifier avec le temps. En conséquence, même si le chantier ne semble pas urgent à certains, il devrait déjà avoir commencé

ANZ