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C'est pas mon idée !

jeudi 30 novembre 2017

Timides synergies entre BNP Paribas et Ulule

BNP Paribas
Depuis quelques mois, les banques françaises redoublent d'efforts pour se rapprocher de la FinTech, à coup de partenariats, investissements et autres acquisitions. Pourtant, les exemples concrets d'intégration d'offres restent rares. Une opération conjointe récente entre BNP Paribas et Ulule semble démontrer la difficulté de l'exercice…

Les relations entre les deux entreprises ne datent pas d'hier mais, à l'exception de quelques actions événementielles communes, il aura fallu attendre plusieurs longues années avant qu'une quelconque synergie ne se mette en place. Celle-ci prend la forme d'une proposition de crédit privilégiée destinée aux entrepreneurs ayant réussi leur campagne de financement participatif sur la plate-forme d'Ulule (qui opère sur le modèle des donations avec contrepartie, similaire à celui de l'américain Kickstarter).

S'il n'est pas souvent mis en œuvre par une banque, le principe n'est pas totalement original : la capacité d'une entreprise à convaincre les consommateurs de contribuer économiquement à son développement est un indicateur qu'il est intéressant de prendre en compte pour évaluer l'opportunité de lui accorder un prêt. En l'occurrence, BNP Paribas promet – sous réserve de validation du dossier (sous 48 heures) – d'apporter un financement au moins équivalent à la campagne Ulule, dans la limite de 50 000 euros.

Offre BNP Paribas aux porteurs de projet sur Ulule

Si la démarche de la banque surprend un peu en ne s'adressant (apparemment) qu'à de nouveaux clients, auxquels sont également offertes des conditions promotionnelles d'ouverture de compte, le plus grand reproche qui peut lui être fait est son absence d'intégration (technique) avec la plate-forme de crowdfunding : l'entrée en relation se fait par l'intermédiaire d'un formulaire (simplifié), dont le seul objectif est d'établir un contact, à l'issue duquel le processus habituel sera déroulé sans mettre automatiquement et immédiatement à profit les informations disponibles sur la plate-forme d'Ulule.

Le dispositif souffre ainsi de la comparaison avec celui qu'ING a déployé depuis quelques semaines, dans lequel une coopération étroite entre la banque et deux startups permet de créer une différenciation concurrentielle sensible, au-delà d'arguments marketing classiques. Naturellement, pour parvenir à ce résultat, il faut dépasser le stade actuel de la plupart des partenariats entre FinTech et institutions financières qui, en dépit des affirmations répétées de ces dernières de leur ambition de transformer leur culture, ont les plus grandes difficultés à matérialiser le potentiel de ces collaborations…

mercredi 29 novembre 2017

RBC offre un tableau de bord universel aux PME

RBC
Face à la concurrence émergente de la FinTech sur le segment des petites entreprises, quelques grandes banques tentent de renouveler leurs offres de services afin de reprendre contact avec cette clientèle longtemps délaissée. Après NAB en Australie, c'est au tour de RBC de leur proposer une solution complète de suivi de leur activité.

Entre le besoin de trouver des relais de croissance dans un contexte morose pour leurs revenus et la poussée récente des startups et, peut-être plus encore, des géants du web (Amazon en tête) vers les services financiers dédiés aux PME, les banques se découvrent (enfin !) des raisons de s'intéresser de près aux besoins de ces clients. Étonnamment, les initiatives semblent toutefois privilégier le développement de solutions complémentaires au détriment de produits bancaires qui laissent pourtant souvent à désirer.

Pour RBC, il s'agit donc de proposer aux entrepreneurs une plate-forme intégrée de gestion de leur activité. Celle-ci comprend, d'abord, une sorte d'AppStore dans lequel ils vont pouvoir sélectionner les outils (en ligne) dont ils ont besoin, de la comptabilité au statistiques des sites web, en passant par les ressources humaines, la surveillance de la réputation sur les médias sociaux… Par ailleurs, la plupart de ces logiciels peuvent également être rassemblés dans un tableau de bord unique, pour un accès simplifié.

RBC - Mon tableau de bord d'entreprise

La valeur ajoutée de l'offre réside bien dans cette capacité, qui permet à un responsable de suivre aisément tous les indicateurs importants pour piloter son entreprise sans perdre son temps à manipuler une multitude d'interfaces différentes et hétérogènes. Dans cette logique, on ne peut cependant que regretter l'absence, temporaire selon la communication de RBC, de toute information sur les comptes bancaires au sein du tableau de bord (mais il est vrai que le dispositif est ouvert aux non clients).

Toujours au chapitre des doléances (mineures), il peut paraître étonnant, en 2017, de proposer uniquement une version web d'un service destiné à des responsables d'entreprise qui préféreraient certainement disposer d'une application mobile, plus adaptée à leur mode de vie. Enfin, et surtout, la démarche de RBC me laisse sur ma faim, car elle n'est qu'une adaptation personnalisée (mais sans ajout significatif) d'une plate-forme existante (9 Spokes), à laquelle elle ne fait qu'apporter la crédibilité de sa marque.

Sera-ce suffisant pour fidéliser les clients et les détourner des sirènes de la FinTech ?

mardi 28 novembre 2017

Impact de la FinTech sur les banques anglaises

Bank of England
Pour la première fois, à l'occasion de ses « stress tests » annuels, la Banque d'Angleterre a demandé aux institutions financières du pays d'évaluer l'impact d'un scénario à long terme intégrant, entre autres, une concurrence croissante de la FinTech. Leurs réponses donnent à réfléchir sur leur préparation à des transformations profondes.

Les fameux tests de résistance régulièrement conduits par les autorités réglementaires nationales et européennes sont généralement destinés à vérifier (en résumé) que les fonds propres des banques les plus importantes sont suffisants pour leur permettre de résister aux pires situations de crise. Pour les établissements britanniques, l'édition 2017 comportait un exercice supplémentaire un peu particulier, consistant à projeter les effets plutôt qualitatifs de quelques grandes hypothèses économiques, à un horizon de 7 ans.

Avant d'en évoquer les résultats, la démarche en elle-même mérite d'être considérée à sa juste valeur, puisque, sauf à croire que la Banque d'Angleterre joue avec ses tests, le scénario retenu reflète nécessairement une vision possible, selon elle, de l'avenir du secteur financier. Or ce dernier comprend donc une persistance des taux d'intérêt à un niveau bas, une activité économique morose (à l'échelle de la planète)… et une pression concurrentielle accrue en raison, notamment, des offres de la FinTech.

Dans ses commentaires aux réponses des banques, l'institution enfonce d'ailleurs le clou sur les menaces qu'elle perçoit. Sans aller chercher des propositions futuristes, elle cite ainsi l'entrée en vigueur prochaine de la deuxième directive des services de paiement (DSP2) et l'émergence du mouvement vers l'« open banking » qu'elle entraîne (et que la Banque d'Angleterre soutient aussi activement de son côté, avec ses propres initiatives) comme des facteurs de perturbation encore trop largement sous-estimés.

Il est vrai que les réactions des banques au scénario paraissent optimistes, non en termes d'impact (évalué à un effondrement du ROE – le rendement sur capitaux propres – de 14,7% à 8%) mais surtout du point de vue des solutions envisagées pour y faire face. En effet, la principale mesure contemplée pour endiguer la baisse des revenus se résume à la mise en place d'un programme drastique de réduction des coûts, dont, de surcroît, le régulateur met également en doute la vraisemblance de son efficacité.

Le rapport de la Banque d'Angleterre laisse entendre que d'autres idées ont pu être évaluées mais la réalité est là : au bout du compte, l'imagination des banquiers face à un scénario de disruption ne dépasse pas les habituelles coupes dans les dépenses, les réseaux, les effectifs… Alors, bien que cette série de tests de résistance ait validé la solidité du système financier britannique, on ne peut éviter de s'interroger sur son avenir à long terme… puis de transposer les mêmes réflexions à d'autres pays et régions…

Bank of England – Financial Stability Report

lundi 27 novembre 2017

De l'écoute du client au harcèlement (et retour)

France Inter
Une chronique humoristique matinale sur France Inter, vendredi dernier. Un écho direct à plusieurs commentaires entendus dans les jours qui précédent. Un sentiment diffus que la mode des questionnaires de satisfaction commence effectivement à devenir pénible… Mais alors, faudrait-il remettre en cause l'idée de mieux écouter ses clients ?

Le constat est universel : dès que vous achetez un objet, souscrivez un service, faites intervenir un artisan ou réglez une facture d'hôpital (si, si, je vous assure !), vous allez recevoir, dans les secondes qui suivent ou quelques jours plus tard, un message vous demandant d'exprimer votre avis sur votre expérience (et de fournir quelques données personnelles, au passage). L'habitude en est maintenant tellement ancrée que ces requêtes sont à peine justifiées par une vague promesse d'amélioration de qualité.

Le premier problème de ces sollicitations, surtout quand elles deviennent trop fréquentes, est d'être conçues à l'inverse de l'objectif affiché. En dépit des apparences, elles ne ciblent pas un besoin du client mais bien une préoccupation interne de l'entreprise : comme l'explique clairement François Morel, le consommateur n'a que faire de donner son avis pour obtenir un service parfait (dont il sait fort bien qu'il ne l'obtiendra jamais) mais il saura, en revanche, exprimer son mécontentement si nécessaire.

S'il n'est pas absurde de chercher à mieux comprendre les points de douleur susceptibles d'inspirer une amélioration de service, n'est-il pas totalement contre-productif pour ce faire de passer par un procédé potentiellement générateur d'exaspération ? Incidemment, ceux qui produisent ces enquêtes de satisfaction en utilise-t-il les résultats pour initier des actions correctrices ou, comme nous le soupçonnons tous, leur servent-elles uniquement à se donner bonne conscience ou à, au mieux, en tirer quelques statistiques inutiles ?

Billet de François Morel sur France Inter

Dans tous les cas, pour les entreprises qui souhaitent engager une démarche sincère, écouter la voix du client peut s'envisager autrement. La priorité consisterait à s'intéresser d'abord aux critiques directes et, par exemple, à mettre en place les moyens de collecter et analyser toutes les plaintes émises (sur tous les canaux possibles), la manière dont elles sont traitées… et peut-être, exceptionnellement, d'interroger les intéressés pour savoir si la réponse qui leur a été apportée les comble.

Pour le reste, les petites frustrations qui pourraient être lissées, les petits irritants qui mériteraient d'être effacés, il faudra faire preuve de plus de subtilité (d'ailleurs ils ne seront probablement jamais détectés à travers un questionnaire généraliste). Heureusement, les ressources ne manquent pas pour les identifier. Enfin, le niveau de satisfaction des clients vis-à-vis de l'entreprise peut lui-même être mesuré à travers les informations présentes dans les systèmes existants, en les exploitant judicieusement.

Mettons fin à cette mode idiote des enquêtes automatiques dont, même si elles étaient réellement prises en compte, le consommateur ne verrait jamais en quoi sa contribution a pu avoir la moindre influence et lui laissera donc presque obligatoirement le goût de l'inutilité sinon de l'agacement. Gardons éventuellement cet instrument pour des objectifs vraiment importants, pour lesquels il est difficile de trouver une alternative, et cherchons des moyens plus efficaces pour améliorer la satisfaction des clients…

dimanche 26 novembre 2017

Quelle innovation dans le secteur financier ?

EFMA
Année après année, le rapport de l'EFMA sur l'état de l'innovation dans la banque livre toujours le même constat d'une vision dangereusement limitée de l'ampleur des transformations qui guettent le secteur à moyen terme. Cette édition fait directement écho à l'appel à la créativité que lance Louise Beaumont dans un article pour BankNXT.

Le premier sujet d'inquiétude que soulève cette étude – menée auprès de représentants d'institutions financières de toutes tailles, dans le monde entier – est la découverte que, même en limitant le spectre aux grandes banques, à peine plus de la moitié d'entre elles ont défini une stratégie d'innovation formelle. Ainsi, en dépit de l'extraordinaire agitation qui entoure le sujet, un nombre conséquent d'acteurs persistent à considérer que les changements du monde ne requièrent pas une attention particulière.

Cependant, en réalité, une autre question posée au fil de l'enquête révèle que cet état d'esprit est bien plus largement répandu. En effet, 31% des répondants attendent des résultats de leurs démarches d'innovation à une échéance de moins d'un an, tandis que 54% visent un horizon de 1 à 3 ans. Ces chiffres reflètent ni plus ni moins qu'un manque d'ambition absolument consternant : si les effets de la transformation peuvent se mesurer aussi rapidement, c'est qu'elle n'a pas touché au cœur des modèles existants !

L'observation sur le terrain confirme donc sans équivoque les impressions de Louise Beaumont : les banquiers ne parviennent résolument pas à se projeter dans une véritable réinvention de leurs métiers. Ils envisagent leur évolution principalement sous l'angle de la « digitalisation » des processus (qui constitue justement la première priorité citée dans le rapport de l'EFMA), c'est-à-dire l'introduction de (plus ou moins) nouvelles technologies pour améliorer leur efficacité autour des produits et services actuels.

Rares sont les établissements qui ne se contentent pas d'avancées incrémentales mais, au contraire, cherchent d'abord à imaginer ce que seront les services financiers dans 5 ou 10 ans et dressent les plans qui leur permettront de réaliser leur vision. Ceux-là sont moins inquiets de la concurrence des géants du web et des nouveaux entrants, dont ils inspirent leurs stratégies, et sont plus préoccupés par le renouvellement en profondeur de leurs socles techniques que par les problématiques d'intégration avec le patrimoine historique dans lesquelles s'enfoncent leurs concurrentes passives.

EFMA Report – Innovation in Retail Banking

samedi 25 novembre 2017

Le CMSO teste un nouveau parcours client

Crédit Mutuel du Sud-Ouest
L'idée d'immerger les services financiers dans les parcours de vie des consommateurs (et des entreprises) s'installe doucement et donne naissance à quelques applications ici et … Mais pourquoi serait-elle applicable uniquement à des expériences « digitales » ? C'est justement une autre voie qu'explore [PDF] le Crédit Mutuel du Sud-Ouest.

Parce qu'il représente un des moments les plus importants de l'existence, c'est (évidemment) l'achat immobilier qui fait l'objet de cette nouvelle initiative, à travers laquelle un conseiller de la banque assurera son activité depuis une des maisons témoins du Groupe IGC (spécialiste de la construction de maisons individuelles), à Lacanau. L'objectif est tout simplement de transformer le conseil financier classique en un accompagnement individuel des projets des clients, au plus près de leurs besoins.

L'approche a incontestablement du sens, si l'intégration promise apporte effectivement plus de simplicité et de transparence dans l'expérience client. Comme dans les tentatives équivalentes sur web et mobile, cette exigence doit se traduire par une coopération étroite entre le banquier et l'expert immobilier, dans la découverte des attentes de leur prospect commun, l'élaboration d'une réponse adaptée, la recherche des solutions à mettre en œuvre… À défaut, autant opérer chacun dans son coin !

Naturellement, la démarche du Crédit Mutuel s'inscrit également dans une réflexion plus large sur l'évolution du rôle de l'agence bancaire. Bien que celle-ci reste considérée comme essentielle pour la relation client dans un établissement mutualiste, la réalité de la baisse de fréquentation impose de repenser les dispositifs existants, notamment en rapprochant le conseiller des lieux et des moments où le consommateur à besoin de ses services – ce que permet désormais l'utilisation des technologies modernes – et non plus en lui demandant de se plier aux contraintes édictées par l'institution financière.

Selon cette même logique mais dans un mouvement inverse, le Crédit Mutuel du Sud-Ouest veut aussi faire de ses agences des points de contact privilégiés dans les parcours de ses clients. Dans ce but, il imagine d'offrir un espace à son partenaire IGC dans une de ses implantations (là où l'entreprise souhaite développer sa présence) afin de reproduire le concept dans ses propres locaux, qu'il peut ainsi espérer mieux rentabiliser, surtout en y stimulant une activité de conseil à forte valeur ajoutée.

Sur le chemin de la transformation de la banque et de ses modèles traditionnels, une partie des clients souhaite vraisemblablement continuer à bénéficier d'une relation de proximité, en face à face, en particulier dans des opérations lourdes d'engagement. Cependant, dans ces circonstances comme dans les interactions « digitales », il faut désormais savoir être présent à leurs côtés quand ils le souhaitent, là où ils se trouvent, selon leurs conditions. Voilà l'enjeu numéro 1 aujourd'hui pour les réseaux d'agences…

Crédit Mutuel du Sud-Ouest

vendredi 24 novembre 2017

Qu'est-ce qu'un robo-advisor ?

NatWest
En marge de leurs velléités de collaboration tous azimuts, les banques traditionnelles n'hésitent pas, en parallèle, à essayer de répliquer les succès les plus prometteurs de la FinTech. Mais quand NatWest lance sa solution de « robo-advisor » en Grande-Bretagne, on se demande si elle a bien compris où se situe la valeur des nouveaux modèles.

Soyons clair : en comparaison des expériences passées de quelques établissements (dont Deutsche Bank), la nouvelle offre NatWest Invest a des atouts sérieux et peut certainement rivaliser avec les ténors du domaine, ne serait-ce que par la facilité et la confiance supplémentaire qu'elle peut délivrer instantanément à ses clients existants. En effet, les éléments les plus visibles de la proposition de valeur de la FinTech sont au rendez-vous. Pourtant, certains détails laissent un petit goût d'inachevé…

Les promesses couvrent la plupart des qualités attendues d'une solution « digitale » moderne. La simplicité se remarque dès la prise en main, à travers un questionnaire réduit – qui peut faire l'impasse sur la validation d'identité, puisque le visiteur est déjà connu de la banque – destiné à connaître les projets du client et son appétence au risque. Elle se retrouve dans le suivi de portefeuille, présentant sous forme graphique l'évolution passé et à venir de sa valeur, notamment par rapport aux objectifs prédéfinis.

Autres critères extrêmement importants, le ticket d'entrée est fixé à 500 livres et le coût du service est transparent et aligné sur les standards des « robo-advisors », avec une commission annuelle de 0,95% (maximum) sur le montant total investi et, petite originalité, une rémunération fixe (modérée, à 10 livres) pour le conseil initial, c'est-à-dire le parcours de découverte du projet et de sélection de la stratégie adaptée. En arrière-plan, la mise en œuvre opérationnelle est résolument classique, reposant sur une répartition des investissements sur 5 supports selon leur niveau de risque, plus ou moins élevé.

Welcome to Natwest Invest

Que manque-t-il donc pour faire de NatWest Invest une offre réellement différenciante ? Un peu plus de transparence, pour commencer : les tarifs affichés sont certes attractifs mais la discrète note incitant à consulter les conditions générales pour connaître les conditions dans lesquelles ils sont susceptibles d'évoluer – probablement imposée par un département juridique craignant des changements incontrôlables – détonne.

Plus de personnalisation, ensuite, même s'il faut admettre qu'il s'agit plus d'une opportunité manquée que d'un véritable défaut. Le questionnaire d'appétence au risque désespérément conventionnel (« acceptez-vous que vos investissements en bourse puissent perdre de leur valeur ? »), alors que la banque est censée connaître son client et pourrait, en toute logique, s'appuyer sur ce savoir pour émettre un avis éclairé sur son attitude face aux aléas (à partir d'une analyse de son comportement de dépenses ?).

La même lacune se ressent également dans la vie du produit : au-delà de la mise en place initiale du contrat, il n'est ainsi plus jamais question de conseil, alors que l'évolution des projets enregistrés par ses clients offriraient de multiples possibilités d'interactions personnalisées pour la banque, entre incitation à transférer une partie de ses disponibilités vers son épargne et offres de produits complémentaires, par exemple.

En toute objectivité, des reproches similaires peuvent être adressés à beaucoup de « robo-advisors » actuels. Mais, alors, doit-on considérer que la seule valeur ajoutée de ce modèle réside dans le conseil à la création d'un portefeuille ? Dans cette hypothèse, il est singulièrement facile à dupliquer, y compris par une banque, et il faut s'inquiéter pour des acteurs dont le marché ne présente pas de barrière à l'entrée… Ou bien, le secret du succès réside-t-il ailleurs (au hasard : sur une relation client d'un nouveau genre) ?

jeudi 23 novembre 2017

Plongée dans le chaos de la banque

OCBC Bank
Rejoignant la vogue de l'automatisation des processus grâce aux outils de « RPA », la singapourienne OCBC Bank présente fièrement les gains de productivité qu'elle a obtenus sur un cas d'usage spécifique. Cependant, les détails fournis permettent surtout de prendre conscience de l'état catastrophique d'un back-office représentatif du secteur.

L'accélération des traitements rapportée par la banque après la mise en place d'un « robot » pilotant le parcours de renégociation des crédits immobiliers est tellement énorme qu'elle en paraît caricaturale. La durée de traitement d'une demande, depuis l'appel du client jusqu'à la recommandation d'un produit complet, en passant par l'étude d'éligibilité et la préparation d'un courriel de réponse, a en effet été réduite de 45 minutes à 1 minute. La machine absorbe ainsi une centaine de sollicitations par jour, pour la plus grande satisfaction des utilisateurs, qui apprécient une réactivité inédite.

Derrière son succès apparent, ce cas d'école prend un relief tout particulier quand on réalise que son ampleur tient finalement assez peu à la performance intrinsèque de la solution déployée mais surtout au désastre que constituait la situation d'origine. En d'autres termes, plutôt que de s'extasier de la rapidité du processus après son « optimisation », il faut d'abord s'épouvanter des 45 minutes qu'il requerrait auparavant à un utilisateur humain. D'autant plus que la source du problème n'a pas été adressée.

Car l'opération dont il est question représente 199 étapes réparties entre 27 écrans à dérouler dans 5 systèmes différents ! Rien de surprenant alors à ce qu'un tel dédale soit long (et pénible) à parcourir par un humain et qu'un automate parvienne à réaliser les mêmes actions beaucoup plus rapidement ! Or ce qui doit choquer, ce n'est évidemment pas le temps perdu par la personne en charge des crédits, mais la complexité absurde du processus qui lui est confié. Et c'est donc sur celui-ci qu'il convient d'agir.

Pour qui connaît un peu les arrières-boutiques des institutions financières, la découverte de telles anomalies n'étonnera pas (et n'allez pas croire qu'OCBC Bank est une exception !). Elles découlent simplement d'une longue histoire de l'informatisation, qui a vu leurs activités se transformer en applications, une à une, sans vision d'ensemble et sans grand souci de cohérence. L'empilement de ces strates géologiques aboutit logiquement à un galimatias dont l'utilisateur (humain ou robot) doit s'accommoder.

L'utilisation de « RPA » pour éviter des pertes de temps considérables n'est pas nécessairement une mauvaise idée en soi. En revanche, ce genre d'initiative ne peut pas être considéré comme un objectif : il ne s'agit que d'un palliatif face à un gaspillage invraisemblable. En outre, il ne peut être que temporaire, car la complexité continuera à croître sans fin (avec, par exemple, l'apparition de nouvelles réglementations). Seule une remise à plat des processus peut apporter une réponse viable, à long terme.

Agence OCBC Bank

mercredi 22 novembre 2017

ING imagine un ange gardien financier

Think Forward Initiative
Après l'ère des outils de gestion de finances personnelles (PFM) réduits à une analyse du passé, les nouvelles générations visent dorénavant à devenir de vrais conseillers virtuels. Aux côtés des assistants d'épargne et autres solutions dédiées aux préoccupations de la vie quotidienne, ING veut aussi accompagner les grandes décisions.

À qui n'est-il pas arrivé un jour d'être pris d'une envie irrépressible de s'offrir un meuble, une voiture, un voyage, un appareil électronique…, de céder à la tentation, pour se rendre compte ensuite qu'elle mettait en danger son budget pour des mois, voire des années ? N'auriez-vous pas alors rêvé d'un ange gardien, capable de vous confirmer avant qu'il ne soit trop tard si vous étiez en mesure ou non de satisfaire votre convoitise ? C'est ce que proposera l'application envisagée par la banque, à partir d'une simple analyse de vos conversations sur les réseaux sociaux et de votre historique bancaire.

Avec les gestes d'épargne et quelques autres, les achats importants font partie des moments de vie au cours desquels les comportements du consommateur deviennent irrationnels : même lorsqu'il est parfaitement conscient de sa situation financière, sa capacité à se projeter vers l'avenir plie devant le critère du plaisir immédiat. Rien de tel dans ces circonstances qu'un petit agent virtuel capable de détecter le moment critique et de vérifier objectivement (avec toute la froideur d'un algorithme) l'impact de la dépense et d'expliquer comment elle peut être financée ou pourquoi il vaut mieux l'éviter.

Application « Can I Afford This? »

ING n'est pas tout à fait le premier acteur à concevoir une telle solution : l'éditeur Meniga, en particulier, intégrait cette option dans sa plate-forme de banque digitale dès 2012 ! Elle ne semble pourtant pas avoir remporté un grand succès… Fort de ses recherches sur le comportement, le groupe néerlandais revient néanmoins à la charge et profite de ce concept pour prolonger sa démarche « Think Forward » – qui se limitait jusqu'à maintenant à émettre des idées – vers une mise en œuvre expérimentale.

C'est certainement la prise de conscience de la difficulté à passer de la théorie à la pratique qui conduit le laboratoire d'ING à accueillir désormais un accélérateur. Sa vocation sera de maintenir une continuité dans l'approche d'innovation, avec un canal formel de création et de test de « MVP » (produit minimum viable) dont l'objectif sera d'évaluer la nécessité d'abandonner ou, au contraire, l'opportunité de poursuivre le projet, jusqu'à la mise sur le marché d'une solution complète, avec un plan précis. À défaut, la structure courrait le risque de n'être qu'un incubateur d'idées sans lendemain…

Grâce à cette extension salutaire de périmètre, l'application « Can I Afford This? » pourra donc sortir du carton à dessins et tenter de prouver sa valeur sur le marché…

mardi 21 novembre 2017

AXA passe à l'« assurance as a service »

AXA
L'innovation n'est donc pas réservée aux startups ! Si la première initiative sérieuse d'API dans le secteur de l'assurance peut être attribuée à la jeune pousse Lemonade, celle qu'annonce AXA à Singapour emporte facilement la palme de l'ambition, puisqu'il s'agit ici de basculer vers une nouvelle vision de la relation client.

Actuellement proposé dans un mode pilote (ouvert à candidature), le portail d'API de la compagnie promet de mettre à la disposition de toute entreprise dûment accréditée les interfaces qui étaient jusqu'à maintenant utilisées en interne ou par les partenaires existants. Il devient ainsi possible d'intégrer très simplement – via l'adoption de protocoles standards – l'assurance au cœur des parcours « digitaux » (web, mobiles ou autres), en offrant une expérience utilisateur entièrement transparente et sans rupture.

Dans un premier temps (et pour le lancement officiel, dont la date n'est pas précisée), seules les couvertures pour l'habitation, le voyage et l'automobile sont disponibles. Elles comprennent aussi bien les produits traditionnels que les modèles alternatifs, tels que le paiement à l'usage. Par ailleurs, les API prennent en charge la prospection (c'est-à-dire la présentation du catalogue), la préparation de devis et la souscription. Mais il n'est pas question d'en rester là sur le chemin de l'« assurance as a service ».

En effet, dès la fin du premier trimestre 2018, les lignes de produits santé et vie seront également accessibles et, encore plus important, tous les processus majeurs se verront convertis à l'approche par API. Outre l'entrée en relation, les interactions avec le service client, la gestion et le suivi des polices… et même la déclaration de sinistres pourront être embarqués dans les applications de partenaires. La voie sera de la sorte ouverte à une immersion totale de l'assurance dans les expériences du quotidien, « digitales » ou non.

Portail d'API AXA Singapour

Alors qu'AXA signait il y a quelques mois une première implémentation de son dispositif à travers l'application « Ready to Travel » de SATS, son objectif est dorénavant de le généraliser et l'industrialiser. Pour les entreprises (notamment les banques) qui rechignent toujours à ouvrir leurs services à des tiers, ce nouveau cas exemplaire devrait les aider à enfin comprendre que, bien plus qu'une menace, ce type de démarche devient incontournable, pour adapter leurs métiers aux exigences du monde contemporain.

Au risque de lasser, ressassons l'évidence : quand les services financiers et l'assurance seront majoritairement enfouis dans les parcours de la vie courante, que restera-t-il aux acteurs qui continueront à ne compter que sur les clients et prospects franchissant les portes de leurs agences (physiques ou virtuelles) pour souscrire ? Bien sûr, il subsistera longtemps quelques opportunités, mais elles se réduiront inéluctablement. Voilà pourquoi la publication d'API est un enjeu de survie, dont l'urgence ne peut être négligée.

lundi 20 novembre 2017

Où en est le paiement instantané ?

La Caixa
J'ai peu suivi le sujet jusqu'à maintenant mais l'actualité me rattrape quand CaixaBank annonce en fanfare être désormais prête pour le lancement officiel du dispositif paneuropéen de transferts instantanés (« SEPA Instant Credit Transfer »), ce 21 novembre. Et une question surgit rapidement : où sont donc passées les banques françaises ?

Le « SCT Inst » (en version courte) a vocation à étendre à l'ensemble de l'Union Européenne la possibilité pour chaque citoyen d'exécuter un mouvement de compte à compte, entre établissements participants, dans la limite de 15 000 euros, en moins de 10 secondes, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. À quelques jours de l'échéance, CaixaBank déclare avoir réalisé une première transaction (de test) avec une contrepartie en Autriche et peut ainsi confirmer l'ouverture du service à sa clientèle à la date promise.

Bien que le Conseil des Paiements Européen (EPC) se félicite du nombre élevé (585) de fournisseurs de services de paiement (PSP) qui, avec la banque espagnole, se lanceront effectivement le 21 novembre, la liste [PDF] ne comporte en réalité qu'une poignée de grandes institutions financières, le gros des troupes étant composé des caisses d'épargne autrichiennes et autres entités locales. Sans surprise, outre CaixaBank, les grands noms de l'innovation sont au rendez-vous : ING, ABN Amro, BBVA, Santander…

Transfert instantané avec La Caixa

Cependant, ce qui surprend (et consterne) le plus est l'absence totale des banques françaises, aussi bien au démarrage que dans les mois à venir. En fait, seuls 8 pays sont représentés, dont l'Autriche, l'Italie, les Pays-Bas, l'Espagne, l'Allemagne (timidement)… Que faut-il penser d'un tel désintérêt apparent ? Nos acteurs tricolores rencontreraient-ils des difficultés techniques à s'inscrire dans le nouveau schéma ? Croient-ils encore que leurs clients n'ont aucun intérêt pour un service de virement instantané ?

Je crains fort, en effet, que la vérité ne doive se rechercher qu'entre ces deux options. Après tout, l'hexagone fait partie des pays, de plus en plus rares, qui résistent imperturbablement à l'idée d'accélérer les transferts interbancaires : le consommateur français n'a qu'à se satisfaire des délais habituels de 2 ou 3 jours ou bien, s'il est vraiment pressé, recourir à un système de virement urgent, hors de prix (en moyenne 15 euros par transaction) et qui ne garantit le traitement que dans la journée (sous conditions).

Il faudra pourtant bien un jour prendre conscience de l'évolution du monde… et des attentes des consommateurs : dans un univers de services immédiats, il devient de plus en plus intenable de faire patienter les clients pour une opération aussi triviale qu'un virement. Au-delà de la réflexion théorique, la demande croît et s'exprime de plus en plus bruyamment (par exemple sur les réseaux sociaux), notamment à travers la satisfaction exprimée vis-à-vis des néo-banques (N26, Compte Nickel, Orange Bank…) qui, dans un registre proche, vantent l'actualisation des soldes de compte en temps réel…

dimanche 19 novembre 2017

Société Générale cherche ses intrapreneurs

Société Générale
Résolument convaincus que les services financiers vont profondément évoluer dans les prochaines années, les dirigeants de Société Générale lancent un appel général afin de trouver parmi les presque 150 000 collaborateurs du groupe ceux qui, à partir d'une idée ambitieuse et d'un profond désir d'entreprendre, créeront la banque de demain.

Après quelques expériences ponctuelles, dont celle qui a abouti au lancement de Moonshot par une équipe de la filiale d'assurances de Société Générale, le programme « Internal Startup Call » est en quelque sorte la première étape d'une tentative de généralisation de l'intrapreneuriat. Dans cet esprit, l'objectif visé est de détecter les porteurs de projets disruptifs, où qu'ils soient dans l'organisation, et de les accompagner dans la fondation et le développement d'une véritable startup interne.

En fixant d'emblée la cible sur des modèles en rupture, susceptibles de transformer radicalement les métiers traditionnels, la banque ne peut se permettre d'être directive sur les thèmes qu'elle pourrait privilégier. Elle donne cependant quelques orientations, correspondant aux grandes tendances actuelles : exploitation des données et intelligence artificielle, plates-formes (qui peuvent d'ailleurs s'éloigner des services purement bancaires), paiements, environnement de travail, finance à impact positif…

La démarche elle même – quoique encore en gestation (car non éprouvée) – est conçue pour éviter au maximum les travers de l'innovation disruptive dans une grande structure. Ainsi, le principe affiché d'entrepreneuriat n'est pas que d'affichage et se traduit directement dans les modalités proposées. En particulier, les candidats à l'aventure formaliseront un dossier complet, similaire à un plan d'affaire (business plan), avec lequel ils devront convaincre leurs « investisseurs » (des responsables de la banque).

Société Générale – Internal Startup Call

La méthode continuera à s'appliquer durant toute la vie des projets, à travers, notamment, des points de synchronisation réguliers avec leur « conseil d'administration » (composés des mêmes acteurs) et une évaluation sérieuse, à intervalle régulier, du potentiel de la jeune pousse, qui pourra déboucher sur un arrêt ou un « pivot », afin d'éviter le syndrome du maintien artificiel en activité, sous perfusion, et, au contraire, d'apprendre des échecs et de capitaliser sur toutes les expériences, réussies ou non.

Par ailleurs, des moyens spécifiques seront mis en œuvre pour faciliter la vie des entrepreneurs (il faut bien qu'ils aient un avantage à rester dans le groupe Société Générale plutôt que de se lancer seuls !). Ils disposeront notamment d'un accès privilégié (et accéléré) à des ressources internes pour toutes leurs questions de conformité réglementaire, de cybersécurité… ou en matière d'intégration informatique (avec, par exemple, une offre, d'abord interne, d'API qui est en voie d'industrialisation).

Deux facteurs clés (au moins) donnent à penser que l'« Internal Startup Call » ne sera pas qu'un feu de paille comme le sont parfois les opérations de ce genre. D'une part, il bénéficie d'un engagement fort et visible au plus haut niveau de la hiérarchie, entre le soutien affirmé de Frédéric Oudéa (Directeur Général) et le coaching des autres membres des comités de direction mis à contribution. D'autre part, les attentes sont réalistes et il est admis a priori qu'une approche aussi ambitieuse (et aussi incertaine) pourra conduire, au mieux, à l'émergence d'un ou deux succès majeurs d'ici à une dizaine d'années.

Comme toutes ses consœurs, Société Générale veut profiter du dynamisme extraordinaire de la FinTech pour se transformer. Dans ce but, elle organise (ou accompagne) déjà un certain nombre d'initiatives dans le monde en vue de resserrer ses relations avec les écosystèmes de startups. En parallèle, elle sait aussi que quelques-uns de ses collaborateurs n'attendent qu'un petit coup de pouce pour rejoindre le mouvement… Plutôt que de laisser leur étincelle s'éteindre ou aller s'épanouir ailleurs, elle cherche maintenant à les capter et à catalyser leur énergie…

samedi 18 novembre 2017

Groupama expose ses innovations

Groupama
Avec la présentation de ses innovations les plus significatives de l'année, désormais soumises à l'appréciation du grand public, la troisième édition de son opération « Top Succès » nous offre une vue plongeante sur les thèmes actuellement en vogue au sein de Groupama et, plus généralement, peut-être, dans le secteur de l'assurance.

Sélectionnées parmi 28 propositions émanant de toutes les entités du groupe, les 6 initiatives retenues sont toutes en production et révèlent donc, dans une certaine mesure, les priorités stratégiques retenues pour le court et moyen terme. Et une tendance majeure se dégage clairement dans le palmarès : la prévention est au cœur des préoccupations, principalement dans le domaine automobile (en attendant, vraisemblablement, les immenses changements promis par l'émergence des voitures autonomes).

Entre le calculateur de trajet le plus sûr, déjà évoqué dans ces colonnes, et un dispositif incitant les conducteurs à ne pas consulter leur téléphone au volant, arrêtons-nous un instant sur « Vigielent ». Destinée à lutter contre les risques créés par la circulation des véhicules lents sur le réseau routier (notamment les matériels agricoles), cette solution se compose de deux applications mobiles : une pour la signalisation (avec un suivi en temps réel), la deuxième pour alerter les autres usagers des dangers sur leurs trajets.

Top Succès Groupama 2017

Un point commun à ces innovations est qu'elles ne sont pas directement liées aux métiers de l'assurance. En effet, outre leur focalisation sur la prévention (qu'elles partagent avec l'offre de télé-assistance Noé, autre finaliste des « Top Succès »), elles portent avant tout un enjeu de transformation des comportements au bénéfice de la collectivité, qui non seulement dépasse donc largement les effets sur les risques individuels de l'assuré, mais ont d'autant plus d'impacts qu'elles sont déployées à grande échelle.

Ce constat conduit naturellement à s'interroger sur la source des initiatives. S'il est certes louable qu'un assureur s'empare de ces sujets de société, pour lesquels il a aussi une part d'intérêt commercial plus ou moins direct, il semblerait tout de même préférable qu'ils soient pris en charge par un acteur plus global, qui pourrait être un groupement sectoriel (comme pour la mise en place du e-constat). À défaut, on ne pourra que regretter que les clients d'autres compagnies ne soient pas spontanément sensibilisés à l'existence des solutions utiles pour leur sécurité créées par la concurrence.

vendredi 17 novembre 2017

Les détails insignifiants qui font la différence

Mondo
Ce n'est définitivement pas l'idée du siècle et ceux qui attendent la révolution de la banque peuvent remettre leurs espoirs à demain. Pourtant, la nouvelle méthode d'activation des cartes de paiement que propose Monzo à ses clients depuis quelques jours offre des enseignements utiles sur une approche de design par l'usage.

La dernière innovation de la néo-banque britannique est absolument triviale : afin d'activer la carte qu'il vient de recevoir et, ainsi, de pouvoir commencer à l'utiliser, plutôt que de lui demander de saisir son numéro dans l'application mobile (ce qui, incidemment, est plus sûr que l'habitude française de demander de réaliser un retrait ou un achat avec saisie du code), il lui suffit désormais d'approcher la carte du lecteur NFC de son smartphone (s'il est compatible), pour finaliser l'opération en un seul geste.

Le bénéfice pour le client est modeste, se limitant à éviter une saisie un peu fastidieuse mais unique. En face, il est vrai que la mise en œuvre technique est élémentaire, demandant de capter la notification de présence d'une puce NFC puis de lire le numéro de carte qu'elle porte. Le résultat net est un progrès microscopique pour la satisfaction de l'utilisateur pour un coût de développement négligeable. Mais prenons maintenant du recul : l'accumulation de centaines de petits pas du même genre, tous aussi minuscules, est ce qui, au bout du compte, façonne une expérience client exceptionnelle.

Activation de carte dans l'app Monzo

Pour compléter l'analyse, il faut encore s'arrêter sur un point de méthode. En effet, je suis convaincu que personne ne s'est jamais plaint de la procédure d'activation existante, même s'il est probable que des grincheux ont pu un jour s'énerver en entrant un code erroné… Nous nous trouvons donc ici dans un cas de micro-friction difficile à détecter par la seule écoute des clients, dans lequel des qualités de designer sont indispensables, au plus près des équipes de développement (de préférence en immersion, en pratique), de manière à implémenter rapidement chaque petite amélioration jugée utile.

En synthèse, une leçon à retenir de la démarche de Monzo tient à la dualité de l'innovation, surtout quand cette dernière vise l'expérience utilisateur. Elle ne peut jamais se réduire aux concepts transformants, tels que le lancement d'une néo-banque : elle est aussi faite d'une multitude d'itérations mineures qui, mises bout à bout, permettent d'atteindre l'excellence. Les méthodes applicables et les compétences requises sont différentes dans les deux cas et toutes sont nécessaires pour réussir durablement.

jeudi 16 novembre 2017

Vialink propose le « KYC » en 10 secondes

Vialink KYC
S'il est facile de défendre l'idée d'aborder les exigences réglementaires sous un angle différent, pour les transformer en opportunités, il est évidemment un peu plus difficile de passer à la pratique. C'est pourtant ce que fait Vialink avec sa nouvelle offre d'automatisation de la procédure de « KYC », incontournable dans le secteur financier.

Aujourd'hui, quand une personne souhaite ouvrir un compte, souscrire un crédit ou autre, il lui faut se plier à cette étape obligatoire de vérification d'un certain nombre de critères d'éligibilité, qui passe par le contrôle d'un ensemble de documents justificatifs. Dans la plupart des banques, ces tâches sont réalisées manuellement, ce qui se traduit par des lenteurs de traitement, des pertes de temps, une réactivité limitée, l'application de critères pas toujours homogènes, des risques résiduels de non-conformité…

La promesse de Vialink KYC consiste à éliminer tous ces inconvénients, grâce à une solution automatisée, facile à intégrer dans les systèmes existants des banques. Mis à disposition sous la forme d'une API, le service ingère les images des documents fournis par le client (pièces d'identité, justificatifs de domicile, avis d'imposition, bulletins de salaire) et, en 10 secondes, retourne un score global de fiabilité – sorte de note de confiance à partir de laquelle le conseiller va déterminer sa décision – accompagné d'un dossier complet détaillant les critères ayant amené à cette conclusion.

En quelques instants, la plate-forme se charge de vérifier l'authenticité des pièces transmises, l'absence de toute falsification et leur cohérence générale (par exemple sur l'adresse). À partir des informations extraites des documents, elle va ensuite interroger plusieurs bases de données externes (interdits bancaires, personnes exposées…) pour finaliser l'analyse et restituer son verdict. Cerise sur le gâteau, les professionnels de la conformité utilisateurs de Vialink KYC disposent d'un outil de pilotage à partir duquel il peuvent ajuster à leur convenance tous les paramètres de l'évaluation.

Accueil Vialink KYC

Le résultat est une procédure de « KYC » fiable, évolutive, cohérente, reproductible et traçable (le dossier établi sur chaque opération constitue une preuve d'exécution), limitant donc sérieusement les risques de fraude – en forte hausse ces dernières années – ou d'infraction à la réglementation – avec les éventuelles sanctions associées – et réduisant le temps perdu par les conseillers et les clients dans des contrôles sans grande valeur ajoutée pour la relation bancaire, au profit d'échanges commerciaux, plus utiles.

En attendant son entrée dans d'autres établissements, la solution est déjà mise en œuvre depuis quelques semaines dans le réseau de la BRED (dont Vialink est une filiale), où elle génère une satisfaction inédite pour un projet réglementaire ! L'objectif n'est pas nécessairement de traiter automatiquement tous les cas mais quand l'outil est capable d'en prendre en charge 80%, ses utilisateurs apprécient l'élimination d'une phase souvent délicate des échanges avec les clients (y compris dans la banque à distance).

Outre ses vertus en matière de conformité, l'automatisation des opérations parmi les plus fastidieuses imposées aux institutions financières représente une première avancée considérable dans l'amélioration de l'expérience client. Mais Vialink KYC pourrait également offrir des opportunités supplémentaires : le service restituant le contenu des documents analysés, pourquoi ne pas imaginer d'autres usages de ces données, pour accélérer la suite du parcours ou simplement pour mieux connaître le client ?

Merci à Philippe Sanchis (DG de Vialink) pour la présentation de Vialink KYC !

mercredi 15 novembre 2017

Données de paiement pour ville intelligente

Mastercard
Portés par l'ambition de rendre la ville « intelligente », les programmes d'urbanisme commencent à exploiter massivement les nouvelles technologies. L'analyse de données figure naturellement au premier plan, et elle se nourrit de toute la matière première disponible. Or, les transactions de paiement constituent une source providentielle…

Le raisonnement a conduit logiquement le conseil de la ville de Dublin, qui mène un ambitieux plan de développement, et Mastercard, qui y possède un laboratoire d'innovation, à conclure un partenariat pour 3 ans, aux termes duquel le deuxième va fournir au premier des rapports sur les comportements de dépense des résidents et des visiteurs, sur la base des données de transactions par carte (anonymisées et agrégées), mais aussi par d'autres moyens de paiement, tels que les chèques et les espèces.

L'objectif visé avec cette initiative est simplement d'enrichir le corpus d'information existant (produit notamment par les infrastructures citadines) permettant aux urbanistes de comprendre de la manière la plus précise et la plus complète possible comment la ville est « utilisée », afin de mieux orienter leurs projets, que ce soit pour une meilleure adéquation aux besoins des individus et des entreprises ou pour identifier des possibilités d'influer sur les comportements (par exemple dans le domaine de l'environnement).

Concrètement, les responsables de Dublin espèrent profiter des connaissances dérivées de l'analyse des paiements pour dégager des pistes d'innovation sur des thèmes tels que les transports, la planification et le tourisme. Et comme l'a déjà démontré BBVA en Espagne, le potentiel est immense, même sans explorer tous les détails des transactions, en offrant une fenêtre extraordinaire sur les points chauds et les zones mortes, pour différents types de population (par exemple les touristes), les mouvements dans la ville, l'évolution des tendances au gré des heures, des jours, des saisons…

Depuis quelques années, les institutions financières ont pris conscience de la valeur des données qu'elles détiennent et conservent pour le compte de leurs clients, mais elles ne savent toujours pas très bien comment la cultiver, en pratique. L'utilisation à des fins de service public, où les besoins sont quasiment infinis (et parfois urgents), comme le fait Mastercard (ainsi que quelques autres acteurs), pourrait être une excellente approche pour mettre le pied à l'étrier sans s'attirer les foudres des consommateurs.

Dublin

mardi 14 novembre 2017

Et si on dématérialisait les reçus de paiement ?

Barclays
À une époque où les entreprises essaient de migrer vers des supports électroniques les documents imprimés qu'elles gèrent quotidiennement et tandis que les tenants du paiement sans contact vantent le gain de temps qu'il engendre, comment se fait-il que chaque transaction (par carte ou via mobile) se conclue par la remise d'un reçu papier ?

Une jeune pousse britannique, Flux, tente depuis quelques mois d'apporter une solution élégante à cette question que personne ne se pose. Après avoir conclu un partenariat avec les (inévitables) néo-banques Starling Bank (en production) et Monzo (en test), son service fait maintenant son entrée dans un établissement de premier plan, Barclays, pour une expérimentation imminente, qui vient, en quelque sorte, conclure sa participation à la promotion 2017 de l'accélérateur de startups de la banque.

Pour les utilisateurs, le fonctionnement du système est trivial : au moment de régler un achat chez un commerçant partenaire, le reçu de l'opération est envoyé instantanément dans l'application mobile bancaire, avec tous les détails habituels. Il devient ainsi possible de mieux gérer son budget, en disposant de tous les éléments nécessaires dans un logiciel unique. Profitant des données ainsi captées et afin d'enrichir sa proposition de valeur, Flux ajoute également à son offre la gestion de programmes de fidélité.

Flux

Bien sûr, la promesse de simplification de la vie des consommateurs ne pourra être tenue que si le service parvient à capter tous (ou presque tous) les reçus. Là réside la principale difficulté pour la startup, car il lui faut intégrer l'émission de reçus électroniques dans les terminaux d'encaissement. Résolument engagée à ses côtés, Barclays intervient donc aussi à ce niveau, à travers une collaboration avec sa filiale BarclayCard, qui lui (entr)ouvre les portes de ses clients « acquéreur » (les commerçants).

Plus généralement, la banque offre avec cette initiative une démonstration de sa démarche optimisée de co-innovation, en partant de l'accouchement d'une idée au sein de son accélérateur, puis, dans la droite ligne de l'objectif fixé à ce dernier, en lançant effectivement la solution, une fois parvenue à maturité, auprès d'un échantillon de clients réels (parmi les quelques 10 000 volontaires qui ont rejoint sa plate-forme de beta-test Launchpad) et en continuant à l'accompagner sur l'ensemble de ses besoins.

Certes, Barclays a été prise de vitesse par Starling Bank pour l'implémentation de la solution mais elle sait compenser son (léger) retard avec de solides arguments (l'accès aux commerçants). Et, quoi qu'il en soit, il n'est pas si fréquent de voir une institution financière progresser si rapidement dans le lancement d'un nouveau concept : peut-être la pression des nouveaux entrants, dont certains s'avèrent extrêmement sérieux, commence-t-elle à produire ses effets (salutaires) sur les acteurs historiques…

lundi 13 novembre 2017

BNP Paribas introduit WeChat Pay en Europe

BNP Paribas
Après avoir participé, l'année dernière, à la grande vague de déploiements européens du système de paiement mobile chinois Alipay, BNP Paribas introduit maintenant son concurrent direct WeChat Pay en France, avec une première implémentation effective dans deux des grands magasins parisiens parmi les plus fréquentés par les touristes, les Galeries Lafayette Haussmann et le BHV Marais.

Avec cette nouvelle offre, les commerçants clients de BNP Paribas ont donc désormais la possibilité d'accepter les deux moyens de paiement préférés des quelques 7,4 millions de visiteurs provenant de l'empire du milieu qu'accueille annuellement l'Europe. Entre les 450 millions d'utilisateurs d'AliPay (qui gère plus de la moitié des paiements mobiles en Chine) et les 600 millions de WeChat Pay (détenant 37% de parts de marché), on peut raisonnablement espérer que tous leurs besoins seront couverts.

D'un point de vue pratique, le dispositif repose sur le même principe technique que celui d'Alibaba, c'est-à-dire la capture par le commerçant de l'identifiant du porte-monnaie virtuel de l'acheteur, à travers le code à barres ou le QR-code qu'il présente sur son smartphone. Cette approche le rend « physiquement » compatible avec une multitude de systèmes d'encaissement existants. Naturellement, la banque intervient dans les opérations pour assurer l'exécution des transferts financiers, en collaboration avec Tencent (l'éditeur de WeChat), entre les comptes du payeur et du vendeur.

Pour les commerçants désireux de séduire une clientèle chinoise de plus en plus nombreuse (elle représente jusqu'à la moitié des acheteurs étrangers, dans les grands magasins parisiens), l'enjeu commercial de l'acceptation du paiement mobile est considérable. Une caissière du Printemps Haussmann me confirmait ainsi récemment que ces touristes réglaient aujourd'hui la quasi totalité de leurs emplettes par l'intermédiaire d'Alipay (sa solution y ayant été déployée au cours de l'automne 2016).

Avec le recul, l'irruption des plates-formes chinoises dans les pays occidentaux met en évidence les perspectives culturelles radicalement opposées sur le paiement mobile. D'un côté, le choix entre la carte plastique et le mobile (en écartant d'emblée le cash, avec tous ses inconvénients), guidé uniquement par la facilité d'usage parce que les deux se développent simultanément, s'oriente vers le second. De l'autre, c'est, jusqu'à présent, l'habitude qui prévaut, faute d'avantage concret décisif pour le smartphone. La visibilité croissante de WeChat Pay et Alipay aura-t-elle un impact sur le statu quo actuel ?

WeChat Pay

dimanche 12 novembre 2017

La banque, difficile partenaire de la FinTech

American Banker
Alors que s'installe l'idée que banques et startups de la FinTech ne peuvent survivre que si elles travaillent ensemble à la création des services financiers de demain, un compte-rendu de la conférence annuelle de The Clearing House (chambre de compensation américaine des paiements) fait le point sur les difficultés de ces collaborations.

Face aux récriminations récurrentes des jeunes pousses qui proposent leurs solutions aux grands groupes, ces derniers assument ici totalement les contraintes qu'ils imposent à leurs partenaires, en justifiant leurs pratiques rigoureuses par les arguments habituels de leurs exigences intransigeantes en matière de conformité réglementaire et de préservation de la confiance des clients. Hélas, ils tendent à traduire de la sorte une inflexibilité généralisée qui augure fort mal de leur approche de l'innovation…

Cette attitude rigide reflète en effet directement le travers de la plupart des institutions financières face à la révolution apportée par la FinTech : elles sont (plus ou moins) prêtes à intégrer de nouvelles technologies dans leurs métiers, mais elles abordent cette ouverture en considérant qu'elles sont en position dominante et que ce n'est pas à elles d'adapter leurs modes de fonctionnement au changement. En réalité, elles ne comprennent toujours pas comment affronter les enjeux de transformation.

Soyons clairs : il n'est évidemment pas question de compromettre la sécurité, le respect des réglementations ou de trahir la confiance des clients. En revanche, il doit être possible de décaler les points de vue sur ces sujets et de faire évoluer les méthodes historiques afin qu'elles prennent en compte un environnement en pleine mutation. Dans un certain sens, il s'agirait d'admettre que l'innovation qui obsède les banques traditionnelles concerne l'ensemble de l'organisation et non juste quelques poches locales.

Accepter qu'un texte réglementaire n'impose pas toujours une réponse unique, mais qu'il existe peut-être des moyens de le respecter radicalement différents de ceux qui ont toujours été mis en œuvre depuis la nuit des temps. Réaliser que la confiance des clients peut être renforcée plus sûrement par l'introduction d'une transparence sans concessions dans une expérimentation que par l'immobilisme historique. Voilà quelques pistes de réflexions à explorer pour développer une culture d'innovation universelle.

Croire qu'il est possible de transformer la banque en collaborant avec des startups sans, au préalable, réformer en profondeur les pratiques internes est une pure illusion. Adapter les processus de conformité et de sécurité existants – notamment en les rendant plus fluides et (infiniment) plus réactifs – devrait donc être une priorité. Non seulement ces efforts permettront-ils d'accélérer la transition vers une organisation durablement innovante mais ils contribueront aussi à développer les partenariats fructueux…

The Clearing House Annual Conference

Jeudi 16 novembre (à 14:10), dans le cadre de Cloud Expo Europe 2017, je reviendrai (entre autres) sur le thème des relations entre banques et FinTech à l'occasion de ma présentation « Les 3 âges de la FinTech ».

samedi 11 novembre 2017

Est-ce suffisamment sûr pour essayer ?

McKinsey Insights
Dans une interview pour McKinsey, Tony Hisieh offre une passionnante plongée dans le modèle organisationnel de l'entreprise qu'il dirige, Zappos, qui représente depuis longtemps une référence en matière d'holacratie. Et même si une telle approche reste inimaginable dans la plupart des grands groupes traditionnels, elle peut tout de même apporter une inspiration utile dans certaines de leurs pratiques…

Parce que ses principes d'auto-organisation visent essentiellement à favoriser l'expression de l'intelligence collective, l'holacratie devrait intéresser les mega-structures aux milliers de salariés plus encore que les startups ou les PME telles que Zappos (et ses 1 500 collaborateurs). Mais, évidemment, une transformation de cette ampleur a fort peu de chances de s'imposer à court terme. Alors, pourquoi ne pas commencer par en extraire quelques idées et les expérimenter dans un domaine spécifique ?

C'est dans cet esprit que je retiendrai une infime partie de l'exposé de Tony Hsieh, quand il explique que le critère principal appliqué dans Zappos pour valider une idée et tenter d'en faire une innovation est de déterminer si le risque correspondant est acceptable (plus précisément, en anglais : « is it safe enough to try? »). L'objectif est simple : alors que dans un petit groupe, il est facile de gérer ces décisions par consensus, il faut trouver une autre méthode quand le nombre de personnes impliquées explose.

Sans être aussi formidable qu'une transition vers l'holacratie, une démarche de ce genre n'en constitue pas moins un saut quantique dans la gestion de l'innovation (disruptive). Il s'agit en effet d'admettre que les concepts les plus susceptibles de produire de la valeur ne naissent pas de processus de sélection structurés, passant par les voies hiérarchiques classiques, et qu'il faut, au contraire, laisser leur chance à toutes les propositions, aussi contestées soient-elles, pour autant qu'elles ne mettent pas l'organisation en danger.

Notons à ce stade que la notion de danger invoquée ici – qui peut englober des préoccupations budgétaires, réglementaires, d'image et de réputation, de satisfaction des clients… – doit être prédéfinie et calibrée a priori et non laissée à l'appréciation d'une cascade de décideurs qui s'empresseraient alors de reproduire les schémas habituels de censure. En ce sens, la mise en œuvre (sincère) de ce « simple » principe revient à planter la graine de l'holacratie dans l'entreprise, dans une activité qui s'y prête bien.

Tony Hsieh

vendredi 10 novembre 2017

La géolocalisation pour sécuriser les paiements

U.S. Bank
Bien que le concept existe depuis longtemps, U.S. Bank devient, à l'approche des fêtes de fin d'année 2017 et de la vague massive d'achats qui les accompagne, une des premières banques dans le monde à proposer à ses clients de renforcer la protection de leurs cartes de paiement grâce aux capacités de géolocalisation de leur smartphone.

L'idée est apparue il y a plusieurs années, presque en même temps que se généralisait la présence de puces GPS dans les smartphones : assurer la sécurité des paiements (par carte) en contrôlant la cohérence du lieu de la transaction et de la localisation du payeur (ou de son téléphone, plus précisément). Les premières implémentations ont, bien sûr, été proposées par des startups, mais, outre quelques timides tentatives de banques, les grands réseaux Mastercard et Visa commercialisaient une offre dédiée dès 2014-2015.

U.S. Bank est pourtant la seule grande institution financière que je connaisse qui met à la disposition de ses clients un service universel, accessible simplement et opérationnel en toutes circonstances (et non, uniquement lors de déplacements à l'étranger, comme dans d'autres initiatives). Il suffit en effet d'activer l'option de géolocalisation dans l'application mobile bancaire et, instantanément, chaque demande d'autorisation de paiement est évaluée en fonction de la position du smartphone par rapport au lieu de l'achat.

U.S. Bank Location Services

L'objectif principal n'est pas nécessairement de réduire les risques de fraude mais consiste plutôt à éviter au maximum les cas pénibles de rejet indu de transactions, dont une des causes majeures est justement l'achat réalisé dans un endroit inhabituel, dont le nombre redouble, évidemment, à l'occasion des vacances de fin d'année (surtout aux États-Unis). Au lieu de demander aux clients de déclarer par avance leurs déplacements, il est plus simple, plus efficace et plus fiable d'interroger leur mobile au moment opportun !

Le service a une autre (double) vertu de confiance qu'il ne faut pas négliger : il permet de rassurer les porteurs de cartes à la fois sur les aspects de sécurité et sur leur capacité à régler leurs dépenses sans incident. À la lumière de ces différents bénéfices potentiels, et alors que la protection des moyens de paiement représente un enjeu important dans une période de fraude galopante, il me semble surprenant que ce type de solution – a priori relativement simple à mettre en œuvre (dans le cas d'U.S. Bank, c'est probablement l'offre de Visa qui a été implémentée) – ne soit pas plus répandue…

jeudi 9 novembre 2017

Quelles qualités pour un assistant virtuel ?

Gartner
Après une période d'observation prudente, les entreprises commencent depuis peu à déployer des assistants virtuels intelligents à tout-va, dont, hélas, la plupart échouent lamentablement à satisfaire leurs utilisateurs. Dans un billet de blog, Werner Goertz (Gartner) expose les conditions qu'il juge essentielles pour une implémentation réussie.

Parce que, intuitivement, il est tentant d'associer la sagacité d'un système d'intelligence artificielle au volume d'information qu'il maîtrise, lors de la mise en œuvre d'un assistant virtuel (VPA), les efforts portent fréquemment d'abord sur l'injection d'un maximum de données de référence. Or, si cette base de connaissance a effectivement une certaine importance dans la fourniture de résultats pertinents et utiles, ce n'est pourtant pas elle qui va déterminer l'appréciation que l'utilisateur portera sur son expérience.

Avec un peu de malice, Werner Goertz présente 7 facteurs de satisfaction qui précèdent la quantité de savoir ingurgité dans l'échelle des priorités… mais ils peuvent tous se concentrer dans un principe unique : la découverte et la prise en compte du contexte. Essentiels pour instaurer une (sorte de) relation de confiance, ces préalables doivent prendre diverses formes, entre connaissance intime de l'utilisateur et perception de son environnement, qui demandent alors le déploiement de capacités complémentaires.

Après tout, savoir à qui il s'adresse est un pré-requis élémentaire pour un assistant, qu'il soit humain ou logiciel, afin d'adapter l'aide apportée aux habitudes et aux préférences de son interlocuteur. Dans ce but, les algorithmes peuvent commencer par assembler et analyser les informations disponibles sur lui, en interne ou, peut-être, dans des sources publiques (notamment les réseaux sociaux) susceptible de donner un aperçu de son arrière-plan culturel (à manier avec la plus extrême précaution, naturellement).

Ensuite, l'assistant virtuel doit, grâce à des techniques d'apprentissage automatique, continuellement s'enrichir et développer ses facultés de personnalisation, au fil des interactions, par exemple en utilisant des technologies de détection d'émotion ou de sentiment qui lui permettent d'évaluer la réaction à ses propositions.

Dans le même temps, les conseils formulés dépendent largement des circonstances, telles que la localisation de l'utilisateur ou ce qu'il est en train de faire (est-il dans un taxi ou dans une réunion importante ?), qui représentent autant de paramètres à capter et à combiner avec les autres pour devenir « parfait ». Évidemment, cela inclut aussi la reconnaissance du contexte même de la conversation tenue : il faut comprendre quand la personne fait référence implicitement à ce qu'elle a dit 2 ou 3 répliques plus tôt.

Enfin, même s'il a à sa disposition un corpus d'information quasiment infini, l'assistant virtuel n'est pas (à ce jour) omniscient. Il doit donc non seulement connaître ses limites mais également savoir passer la main à un collègue spécialisé (humain ou non) lorsqu'elles sont atteintes, en totale transparence.

En synthèse, ce qui différencie fondamentalement une FAQ (Foire aux Questions) interactive d'un véritable assistant virtuel réside entièrement dans la personnalisation de l'interaction. Seule cette qualité – qu'il faudra sans cesse améliorer – permettra réellement de répondre aux attentes des utilisateurs. En attendant, il ne faudra pas s'étonner qu'ils se détournent des gadgets qui leurs sont proposés aujourd'hui après deux ou trois tentatives justifiées par une envie ludique d'expérimenter une petite nouveauté.

Ex Machina (le film)